Sur la base des estimations de coûts réalisées sur les différents postes de coûts, le devis à terminaison (en euros 2022) des 2 tranches Fessenheim 900 MW s’élève à environ 1,0 milliard d'euros, soit 0,5 milliard d'euros en moyenne pour une tranche 900 MW à comparer aux 0,38 milliard d'euros de coût moyen pour le parc REP complet en tenant compte des effets de série et mutualisation décrits précédemment.
Le démantèlement des réacteurs à l’arrêt, représente des opérations pilotes correspondant à quatre technologies différentes et présentant des spécificités marquées : REP à Chooz A inséré dans une caverne, Uranium Naturel – Graphite – Gaz (UNGG) à Bugey, Saint-Laurent et Chinon, eau lourde à Brennilis, réacteur à neutrons rapides refroidi au sodium à Creys-Malville, et REP à Fessenheim (la tête de série des réacteurs de 2ème génération).
Les coûts de déconstruction sont évalués à partir de devis, qui prennent en compte le retour d’expérience industriel, les aléas et évolutions réglementaires, et les dernières données chiffrées disponibles. Ils sont revus annuellement depuis 2015.
La stratégie industrielle du démantèlement des réacteurs UNGG a été profondément revue fin 2015 avec en particulier le passage d’un démantèlement sous eau à un démantèlement sous air. Elle prévoit :
Cette nouvelle stratégie se traduit par une fin des opérations relatives au démantèlement des caissons réacteurs entre 2063 et 2093, selon les réacteurs.
La mise à jour du scénario industriel du démantèlement des centrales de première génération, en particulier celui relatif aux UNGG, avait conduit à augmenter la provision de 590 millions d’euros au 31 décembre 2015.
De 2016 à 2020 :
L’évolution du scénario industriel de démantèlement des réacteurs UNGG opérée en 2015 a été présentée au collège des Commissaires de l’ASN le 29 mars 2016, et instruite par l’ASN jusqu’en 2019, Elle a fait notamment l’objet d’une revue d’experts internationaux, d’une instruction par l’IRSN, de trois auditions du collège des commissaires de l’ASN, et a donné lieu finalement à deux décisions de l’ASN datées du 3 mars 2020.Les décisions et les échanges qui ont précédé leur adoption par l’ASN ont montré une convergence sur la plupart des sujets techniques majeurs : technique de démantèlement (sous air), intérêt de mettre en place un démonstrateur industriel pour développer les outils nécessaires à ces opérations complexes, planning de démantèlement du réacteur de Chinon A2, nécessité de disposer d’un retour d’expérience des opérations sur un premier réacteur.
En termes de calendrier, l’ASN demandait de retenir, dans les projets de décision mis en consultation publique en 2019, un calendrier anticipé par rapport à celui proposé par EDF, afin que le début des opérations de démantèlement des cinq réacteurs suivant Chinon A2 soit « au plus tard le 31 décembre 2055 ».
En 2019, la prise en compte de ce souhait de calendrier plus resserré a conduit globalement à augmenter les provisions nucléaires de 108 millions d’euros, dont 77 millions d’euros concernent la provision pour déconstruction des centrales nucléaires et 31 millions d’euros concernent la provision GLTD (déchets FAVL, TFA et FMA).
Les décisions de l’ASN relatives au démantèlement des réacteurs UNGG publiées en mars 2020, n'ont pas remis en cause des principes inscrits dans les projets de décision de 2019. Les provisions nucléaires au titre de la déconstruction des UNGG n’ont en conséquence pas fait l’objet de réévaluation particulière à ce titre en 2020 et reflètent la meilleure estimation du scénario industriel et technique.
En 2021, la revue annuelle des devis des centrales définitivement arrêtées a notamment amené à une augmentation des provisions de 77 millions d’euros suite à la révision de la stratégie industrielle du démantèlement de Chooz A pour passer sur un scénario de « démantèlement complet continu - DCC », avec un abandon de la période de surveillance des eaux de ruissellement de la caverne entre la fin du démantèlement des installation et le début de la phase de démantèlement ultime et assainissement, celle-ci n’étant plus nécessaire compte tenu de la qualité de ces eaux. Par ailleurs, une mise à jour de l’évaluation des coûts de démantèlement de l’APEC - atelier pour l’entreposage du combustible exploité par EDF sur le site de Creys-Malville et dont l’activité principale est l’entreposage du combustible issu de Superphénix - a été réalisée sur la base d’études d’Avant-Projet Sommaire menées en 2020-2021, conduisant à une augmentation de provisions de 61 millions d’euros.
Enfin, conformément aux prérogatives fixées par l’article 594-4 du Code de l’environnement, la Direction Générale de l’Énergie et du Climat (DGEC) avait commandité en juin 2020 la réalisation d’un audit externe sur l’évaluation du démantèlement des installations nucléaires arrêtées d’EDF (installation UNGG et gestion de ses déchets FAVL, Superphénix et Brennilis) conduit par un consortium de cabinets spécialisés. L’audit s’est déroulé de décembre 2020 à juillet 2021. Le rapport a été mis en ligne sur le site du Ministère de la Transition Ecologique en novembre 2021. Ses conclusions (qui confirment les constats réalisés par l’ASN au titre de leur inspection sur le pilotage de projets complexes dont les conclusions ont été communiquées au premier trimestre 2021) soulignent « une organisation structurellement orientée vers la réalisation des projets de démantèlement », un « processus de chiffrage et de révision annuelle [qui] est robuste, et permet une bonne traçabilité des hypothèses utilisées et des données d’origine » et « une démarche industrielle de long terme pour surmonter les quelques défis technologiques restants ». Enfin, le rapport indique, au-delà d’un correctif non significatif (qui a été pris en compte dans les provisions à fin 2021), que « les provisions sont cohérentes avec les scénarios de base des projets et couvrent le périmètre complet des charges du périmètre audité » et leur « dimensionnement adéquat » au travers d’une mise à l’épreuve du dimensionnement des charges et provisions de EDF.
En 2022, en lien avec les recommandations de l’audit commandité par la DGEC visant à conforter l’évaluation des risques planning et des niveaux d’incertitudes sur les chiffrages, une méthodologie d’estimation analytique de risques et incertitudes planning (appliquées à la plupart des projets de déconstruction en cours), ainsi qu’un niveau supplémentaire d’incertitude pour les chiffrages « à dire d’expert » (mis en œuvre sur les provisions pour déconstruction et pour gestion à long terme des déchets radioactifs) ont été introduits, conduisant à une augmentation de provisions pour déconstruction des centrales nucléaires arrêtées de 116 millions d’euros.
Il est par ailleurs à noter une augmentation de la provision pour déconstruction de Chooz A de 37 millions d’euros résultant de la prise en compte du retour d’expérience consolidé d’aléas et de décalages observés sur le chantier de démantèlement de la cuve (cadences de découpe plus faibles et indisponibilité du pont de manutention). Ce retour d’expérience conduit à prolonger de 18 mois le chantier de démantèlement de la cuve, et à identifier un risque de décalage supplémentaire de 14 mois sur le planning global.
Concernant les UNGG, la revue annuelle des devis a pris en compte un décalage d’obtention des décrets d’autorisation de démantèlement (attendus dorénavant fin 2026 contre fin 2025 auparavant), sans impact significatif sur les provisions.
Enfin, sur l’horizon court terme, il a été pris en compte dans les provisions un effet au titre de l’augmentation prévisible au-delà des prévisions d’inflation des prix de certaines matières premières, énergie et transport, en particulier en lien avec les typologies d’achat pour les dépenses de déconstruction, impactant les provisions pour déconstruction des centrales nucléaires arrêtées pour 33 millions d’euros.