Document d'Enregistrement Universel 2021

6. États financiers

Le devis intègre également, par prudence, une évaluation des risques et incertitudes de la façon suivante :

  • intégration d’incertitudes sur chaque brique « élémentaire » des coûts, sur les effets de série, de mutualisation, coefficients de transposition, et sur les frais de parc ;
  • intégration de risques, correspondant aux risques de réalisation (identifiables et chiffrables mais dont l’occurrence n’est qu’éventuelle). Une première constitution du registre des risques du projet de Fessenheim a été réalisée en 2021 sur la base des études en cours, et l’évaluation précise de ces risques se poursuit pour une TTS 900 MWe hors spécificité du site Fessenheim. Dans l'attente des résultats, l’impact financier des risques et opportunités est intégré via une majoration forfaitaire.

La méthode retenue ci-dessus pour l’évaluation des risques et incertitudes aboutit à une marge globale de l’ordre de 15,7 % pour l’ensemble du parc (19,5 % pour la tête de série 900 MWe).

Depuis sa révision approfondie en 2016, le devis fait l’objet d’une revue annuelle, qui a depuis donné lieu à des ajustements annuels peu significatifs.

En 2021, pour prendre en compte les impacts de l’allongement de la durée d'amortissement des centrales du palier 1 300 MWe, le séquencement des opérations d’envoi des déchets de démantèlement a été adapté à la suite de l'augmentation sur certaines années des flux de déchets de déconstruction vers les entreposages.

Par ailleurs, le devis de référence de la tête de série 900 MWe a été mis à jour afin de prendre en compte les études d’avant-projet menées en préparation du démantèlement de Fessenheim, ainsi que le retour d’expérience du début de sa phase prédémantèlement. Cette mise à jour a intégré également une optimisation du scénario industriel pour la gestion des déchets de déconstruction avant stockage avec un traitement préalable permettant de réduire les volumes stockés. L’extrapolation de ces éléments à l’ensemble du parc REP a un impact limité sur la provision pour déconstruction des centrales nucléaires en exploitation, soit une augmentation de la provision de 149 millions d’euros, par contrepartie des actifs au bilan.

Par ailleurs, EDF conforte ses analyses par une intercomparaison internationale prenant soin d’identifier et de caractériser un certain nombre d’éléments pouvant fausser des comparaisons directes comme notamment les différences de périmètres des devis ou les contextes nationaux et réglementaires.

Sur la base des estimations de coûts réalisées sur les différents postes de coûts, le devis de référence à terminaison (en euros 2021) de 2 tranches TTS 900 MWe (Fessenheim) s’élève à environ 0,8 milliard d’euros, soit 0,4 milliard d’euros en moyenne pour une tranche TTS 900 MWe à comparer aux 0,36 milliard d’euros de coût moyen pour le parc REP complet en tenant compte des effets de série et mutualisation décrits précédemment.

Pour les centrales nucléaires définitivement arrêtées

Le démantèlement des réacteurs à l’arrêt représente des opérations pilotes correspondant à quatre technologies différentes et présentant des spécificités marquées : REP à Chooz A inséré dans une caverne, Uranium Naturel – Graphite – Gaz (UNGG) à Bugey, Saint-Laurent et Chinon, eau lourde à Brennilis, réacteur à neutrons rapides refroidi au sodium à Creys-Malville, et REP à Fessenheim (la tête de série des réacteurs de 2nd génération).

Les coûts de déconstruction sont évalués à partir de devis, qui prennent en compte le retour d’expérience industriel, les aléas et évolutions réglementaires, et les dernières données chiffrées disponibles. Ils sont revus annuellement depuis 2015. En 2015, la stratégie industrielle de démantèlement des centrales UNGG a été totalement revue. La stratégie précédemment retenue reposait sur un scénario de démantèlement des caissons (bâtiments réacteurs UNGG) « sous eau », pour quatre d’entre eux, avec stockage direct du graphite dans un centre en cours d’étude par l’ANDRA (voir note 28.2 « Déchets FAVL »). Un ensemble de faits techniques nouveaux a fait apparaître que la solution alternative d’un démantèlement « sous air » des caissons était de nature à permettre une plus grande maîtrise industrielle des opérations et se présentait plus favorablement au regard des enjeux de sécurité, de radioprotection et d’environnement. Un scénario de démantèlement de l’ensemble des six caissons « sous air » a donc été retenu comme nouvelle référence par l’entreprise. Ce scénario intègre la consolidation du retour d’expérience après le démantèlement d’un premier caisson, avant d'engager celui des cinq autres. Il conduit au final à une phase de déconstruction plus longue que précédemment envisagée, conduisant à un renchérissement du devis du fait des coûts d’exploitation induits.

La mise à jour du scénario industriel de démantèlement des centrales définitivement arrêtées, en particulier celui relatif aux UNGG, a conduit à augmenter la provision de 590 millions d’euros au 31 décembre 2015.

En 2016, la révision des provisions des centrales définitivement arrêtées a donné lieu à des ajustements non significatifs, à l’exception d’une augmentation de 125 millions d’euros pour une installation particulière (Atelier des Matériaux Irradiés de Chinon). En 2017 et 2018, cette revue a donné lieu à des ajustements non significatifs.

L’évolution du scénario industriel de démantèlement des réacteurs UNGG opérée en 2015 a été présentée au collège des commissaires de l’ASN le 29 mars 2016. En 2018, l’ASN a fait part de ses principales questions et conclusions sur le dossier de stratégie UNGG. Le démantèlement sous air de l’ensemble des réacteurs, l’intérêt d’un démonstrateur industriel, et le planning du premier réacteur démantelé « tête de série » (Chinon A2) ont fait l’objet d’un consensus. Les échanges se sont poursuivis en revanche sur le planning de démantèlement des 5 autres réacteurs. Le planning proposé par EDF permet de disposer d’un retour d'expérience significatif (démantèlement d’un premier réacteur) avant de démarrer le démantèlement quasi simultané des 5 autres réacteurs. EDF a été auditionné le 12 février 2019 par le collège des commissaires de l’ASN sur ce sujet particulier afin de présenter l’ensemble des éléments soutenant le calendrier retenu. Sur cette base, des projets de décision de l’ASN ont été soumis à consultation du public de juillet à novembre 2019. Ces projets prescrivent la date de dépôt des dossiers réglementaires qui permettront d’autoriser les travaux de démantèlement ainsi que le programme de démantèlement qui doit être intégré dans ces dossiers. Dans ces projets, l’ASN reconnaît la complexité des opérations à mener, le bien-fondé de la stratégie de maîtrise des risques proposée par EDF (démonstrateur industriel, retour d'expérience conséquent sur un premier réacteur). Elle demande toutefois une légère anticipation des travaux sur les 5 réacteurs suivant la tête de série, pour lesquels les travaux doivent avoir commencé en 2055.

En 2019, la prise en compte de ces projets de décision a conduit globalement à augmenter les provisions nucléaires de 108 millions d’euros, dont 77 millions d'euros concernent la provision pour déconstruction des centrales nucléaires et 31 millions d’euros concernent la provision GLTD (déchets FAVL, TFA et FMA).

Les décisions de l’ASN relatives au démantèlement des réacteurs UNGG ont été publiées le 17 mars 2020, sans remise en cause des principes inscrits dans les projets de décision de 2019. Les provisions nucléaires au titre de la déconstruction des UNGG n’ont en conséquence pas fait l’objet de réévaluation particulière à ce titre en 2020 et reflètent la meilleure estimation du scénario industriel et technique.

En 2020, la revue annuelle des devis des centrales définitivement arrêtées a notamment amené à une augmentation des provisions de 45 millions d’euros au titre de retards sur le chemin critique à la suite de l’arrêt des chantiers lors de la 1re phase de confinement et à la suite d’un aléa majeur en lien avec l’arrêt du chantier de découpe des internes de Chooz A. Une mise à jour des coûts sur l'assainissement du génie civil a été également réalisée, conduisant à une augmentation des provisions de 43 millions d’euros au périmètre des installations arrêtées dans leur ensemble.

En 2021, la revue annuelle des devis des centrales définitivement arrêtées a notamment amené à une augmentation des provisions de 77 millions d’euros à la suite de la révision de la stratégie industrielle du démantèlement de Chooz A pour passer sur un scénario de « démantèlement complet continu – DCC », avec un abandon de la période de surveillance des eaux de ruissellement de la caverne entre la fin du démantèlement des installations et le début de la phase de démantèlement ultime et assainissement, celle-ci n’étant plus nécessaire compte tenu de la qualité de ces eaux. Par ailleurs, une mise à jour de l’évaluation des coûts de démantèlement de l’APEC – atelier pour l’entreposage du combustible exploité par EDF sur le site de Creys-Malville et dont l’activité principale est l’entreposage du combustible issu de Superphénix – a été réalisée sur la base d’études d’Avant-Projet Sommaire menées en 2020-2021, conduisant à une augmentation de provisions de 61 millions d’euros.

Enfin, conformément aux prérogatives fixées par l’article 594-4 du Code de l'environnement, la Direction Générale de l’Énergie et du Climat (DGEC) a commandité en juin 2020 la réalisation d’un audit externe sur l’évaluation du démantèlement des installations nucléaires arrêtées d’EDF (installations UNGG et gestion de ses déchets FAVL, Superphénix et Brennilis), conduit par un consortium de cabinets spécialisés. L’audit s’est déroulé de décembre 2020 à juillet 2021. Le rapport a été mis en ligne sur le site du ministère de la Transition écologique en novembre 2021. Ses conclusions (qui confirment les constats réalisés par l’ASN au titre de leur inspection sur le pilotage de projets complexes dont les conclusions ont été communiquées au premier trimestre 2021) soulignent « une organisation structurellement orientée vers la réalisation des projets de démantèlement », un « processus de chiffrage et de révision annuelle qui est robuste, et permet une bonne traçabilité des hypothèses utilisées et des données d’origine » et « une démarche industrielle de long terme pour surmonter les quelques défis technologiques restants ». Enfin, le rapport indique, au-delà d’un correctif non significatif (qui a été pris en compte dans les provisions à fin 2021), que « les provisions sont cohérentes avec les scénarios de base des projets et couvrent le périmètre complet des charges du périmètre audité » et leur « dimensionnement adéquat » au travers d’une mise à l'épreuve du dimensionnement des charges et provisions d’EDF.