Document d'Enregistrement Universel 2021

6. États financiers

Concernant Fessenheim, les deux réacteurs à eau pressurisée ont été mis à l'arrêt définitif respectivement le 22 février 2020 et le 30 juin 2020, conformément aux dispositions législatives et de façon anticipée par rapport à la fin de leur durée de vie technique, l’APC (Avant-Projet Consolidé) a été finalisé fin 2018, avec des études d’approfondissement et de dérisquage de l’APS (Avant-Projet Sommaire). Le Plan de démantèlement a été transmis à l’ASN en septembre 2019 accompagnant la déclaration d’arrêt définitif de cette INB. Les études de 2019 et 2020 ont porté sur la préparation du dossier de démantèlement, qui a été transmis à l’ASN le 2 décembre 2020. À partir de la date du dépôt et pour une durée de 3 à 5 ans, l’ASN instruit le dossier. L’année 2021 a été marquée par l’évacuation complète du combustible de la tranche 1, la préparation de la décontamination du circuit primaire qui aura lieu en 2022 ainsi que par l’expédition des premiers déchets d'exploitation vers ICEDA et des parties supérieures des Générateurs de Vapeurs à la filiale Cyclife Sweden pour traitement, conformément aux objectifs des travaux et études du projet de préparation du démantèlement Fessenheim.

Les provisions pour déconstruction couvrent les charges futures de déconstruction telles que décrites ci-dessus (à l’exception de l’évacuation et du stockage des déchets qui relèvent de la provision pour gestion à long terme des déchets radioactifs).

Les variations des provisions pour déconstruction des centrales nucléaires se répartissent comme suit :

    Dotations Reprises   31/12/2021
(en millions d’euros) 31/12/2020 Exploitation Financières (1) Suite à utilisation Provision sans objet Autres mouvements (2)
Provisions pour déconstructiondes centrales nucléaires en exploitation 12 775 - 396 (7) - (484) 12 680
Provisions pour déconstructiondes centrales nucléaires arrêtées 4 714 262 253 (179) - - 5 050
TOTAL PROVISIONS POUR DÉCONSTRUCTION DES CENTRALES NUCLÉAIRES 17 489 262 649 (186) - (484) 17 730

(1) Il s’agit des charges financières de désactualisation et des effets de variation du taux d’actualisation net pour les provisions non adossées à des actifs.

(2) Les autres mouvements sur les provisions pour déconstruction des centrales nucléaires en exploitation comprennent notamment l’impact de l’allongement de la durée d'amortissement des centrales du palier 1 300 MWe (voir note 2.1.1), compensé en partie par les effets du changement de taux d’actualisation réel au 31 décembre 2021.

Pour les centrales nucléaires en exploitation (filière réacteur à eau pressurisée (REP) paliers 900 MWe, 1 300 MWe et N4)

Jusqu’en 2013, les provisions ont été évaluées sur la base d’une étude du ministère de l’Industrie et du Commerce datant de 1991, qui a déterminé une estimation du coût de référence de déconstruction exprimé en euros par mégawatt, confirmant les hypothèses de la Commission PEON de 1979. Ces évaluations avaient été confortées, à partir de 2009, par une étude détaillée des coûts de déconstruction réalisée par l’entreprise sur un site représentatif, soit le site de Dampierre (4 tranches 900 MWe) et dont les résultats ont été corroborés par une intercomparaison avec l’étude du cabinet La Guardia, fondée notamment sur le réacteur de Maine Yankee aux États-Unis.

En 2014, l’étude Dampierre a fait l’objet d’un réexamen par l’entreprise pour s'assurer qu’il n’y avait pas d’évolutions ou de retours d’expérience récents, tant au niveau international qu’en interne, remettant en cause les chiffrages précédents. Les provisions pour déconstruction des centrales en exploitation ont alors été évaluées sur la base des coûts issus de l’étude Dampierre afin de prendre en compte les meilleures estimations de l’entreprise et les retours d’expérience en France et à l'international. Ce changement d’estimation n’avait pas eu d’impact significatif sur le niveau des provisions au 31 décembre 2014.

Entre juin 2014 et juillet 2015, un audit sur les coûts du démantèlement du parc nucléaire d’EDF en exploitation, commandité par la Direction Générale de l'Énergie et du Climat (DGEC), a été conduit par des cabinets spécialisés. Le 15 janvier 2016, la DGEC a rendu publique la synthèse du rapport de cet audit. L’Administration a indiqué que, bien que l’estimation du coût du démantèlement de réacteurs nucléaires reste un exercice délicat, compte tenu du retour d'expérience relativement limité, des perspectives d’évolution des techniques et de l'éloignement des dépenses dans le temps, l’audit confortait globalement l’estimation faite par EDF du coût du démantèlement de son parc nucléaire en exploitation. L’Administration a également formulé à EDF un certain nombre de recommandations à la suite de cet audit.

En 2016, EDF a effectué une révision du devis de démantèlement afin de prendre en compte, d’une part, les recommandations de l’audit qui lui avaient été adressées, et d’autre part, le retour d’expérience des opérations de démantèlement des réacteurs de première génération (en particulier Chooz A).

Le travail de révision du devis a consisté en la mise en œuvre d’une démarche analytique détaillée, identifiant l’ensemble des coûts d’ingénierie, de travaux, d’exploitation et de traitement des déchets liés au démantèlement futur des réacteurs en cours de fonctionnement. Il a permis d’aboutir à un chiffrage reposant sur des chroniques détaillées de démantèlement des centrales. La démarche adoptée a permis d’approfondir l’évaluation des coûts propres aux têtes de série, estimés pour chaque palier à partir de coefficients de transposition appliqués au coût de référence de la tête de série 900 MWe, ainsi que les effets de série et de mutualisation, ces coûts et effets étant en effet inhérents à la taille et à la configuration du parc.

Les natures des principaux effets de série et de mutualisation et de série retenus dans les chiffrages du devis sont explicitées ci-dessous.

Les effets de série (effet sur les sites suivants le site tête de série d’un même palier) sont principalement de deux natures différentes :

  • un premier effet provient du fait que sur un parc de même technologie, une large part des études ne doit pas être refaite à chaque fois ;
  • un second effet provient du fait que, sur un parc de même technologie, les robots et les outillages peuvent être très largement réutilisés d’un chantier à l'autre.

Les effets de mutualisation (effets entre les différentes tranches présentes sur un même site qu’elles soient en exploitation ou en démantèlement) sont quant à eux de différentes natures :

  • certains sont liés au partage de bâtiments et d’équipements communs entre plusieurs réacteurs d’un même site, qui ne sont pas à démanteler deux fois ;
  • certains coûts ne sont pas accrus si l’on démantèle 2 ou 4 réacteurs sur un même site. C’est le cas généralement des coûts de surveillance, d'équipements communs, et de maintien du site en conditions opérationnelles sûres.

Ainsi, du fait de l’effet de mutualisation, le démantèlement d’une paire de réacteurs sur un même site coûte moins cher que le démantèlement de deux réacteurs isolés sur deux sites différents. En France, à la différence des autres pays, il n’y a pas de réacteurs isolés mais des sites avec 2, 4 et dans un cas, 6 réacteurs.

Les effets de série et de mutualisation sont respectivement de 10 % et de 6 % sur le devis par rapport à un devis qui ne prendrait en compte aucun effet de série ou démutualisation. Ces effets varient selon les paliers, les effets seront d’autant plus importants en fonction du nombre de tranches d’un palier (effet de série) et du nombre de tranches par site (effet mutualisation), ce qui conduit à des effets sur le palier 900 MWe supérieurs à 16 % (effets de série et mutualisation).

Les effets de série et de mutualisation, notamment, permettent d'expliquer pourquoi une simple comparaison des coûts moyens de démantèlement par réaction entre le parc français et les parcs nucléaires d’autres pays n’est pas pertinente.

A contrario, les chiffrages n’intègrent que de façon très marginale l’évolution de la productivité et l’effet d’apprentissage. L’audit externe mandaté par la DGEC sur le coût de démantèlement du parc en exploitation avait à cet égard considéré que cette option représentait une prudence d’estimation.