Document d'Enregistrement Universel 2021

6. États financiers

Jusqu’en juin 2015, le montant brut et l’échéancier des dépenses prévisionnelles étaient basés sur un scénario industriel de stockage géologique établi à partir des conclusions rendues au premier semestre 2005 par un groupe de travail constitué sous l’égide de l’État et réunissant les administrations concernées, l’ANDRA et les producteurs de déchets (EDF, Orano, CEA). EDF avait effectué une déclinaison raisonnable des éléments issus de ce groupe de travail et avait abouti à un coût de référence du stockage des déchets de l’ensemble des producteurs à 14,1 milliards d’euros aux conditions économiques de 2003 (20,8 milliards d’euros aux conditions économiques de 2011 et en prenant en compte l’inventaire de 2011).

En 2012, l’ANDRA a réalisé les études d’esquisse sur le projet de stockage géologique (Cigéo).

Sur cette base, l’ANDRA a établi un dossier de chiffrage, qui a fait l’objet, conformément à la loi du 28 juin 2006, d’un processus de consultation, initié fin décembre 2014 par la Direction Générale de l’Énergie et du Climat (DGEC) auprès des producteurs de déchets. Dans ce cadre, EDF et les autres producteurs ont transmis en avril 2015 à la DGEC leurs observations ainsi qu’une évaluation conjointe du coût objectif du stockage Cigéo du fait de divergences de valorisation d'optimisations techniques et de leurs effets induits. Le dossier intégrant ces éléments ainsi que l’avis de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a été soumis à la ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie.

L’arrêté du 15 janvier 2016 pris par le ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie fixe le coût objectif du projet de stockage Cigéo à 25 milliards d’euros aux conditions économiques du 31 décembre 2011. Le coût arrêté constitue un objectif à atteindre par l’ANDRA, dans le respect des normes de sûreté fixées par l’ASN, et en s’appuyant sur une coopération étroite avec les exploitants d’installations nucléaires.

En application de cet arrêté, il a été prévu que le coût du projet Cigéo serait régulièrement mis à jour et a minima aux étapes clés du développement du projet (autorisation de création, mise en service, fin de la « phase industrielle pilote », réexamens de sûreté), conformément à l’avis de l’Autorité de sûreté nucléaire.

En avril 2016, l’ANDRA a transmis à l’ASN un dossier d’options de sûreté (DOS). La loi du 11 juillet 2016 a par ailleurs précisé la notion de réversibilité.

Le 11 janvier 2018, l’ASN a rendu son avis sur le DOS estimant que le projet Cigéo a atteint globalement une maturité technologique satisfaisante à ce stade. À noter que dans cet avis, l’ASN demande que pour les déchets bitumineux, des filières alternatives à leur stockage en l’état à Cigéo soient étudiées. Le groupe d’experts mandaté par la DGEC, en septembre 2018 pour faire un état des lieux de la gestion des bitumes, a conclu en septembre 2019 à la faisabilité a priori des différentes options de gestion (stockage ou neutralisation) mais souligne l’importance de poursuivre les études engagées pour identifier l’option la plus pertinente.

La revue de conception détaillée, organisée à la demande de la DGEC par un groupe d'experts indépendants, a rendu ses conclusions fin 2020. Tout en émettant un avis globalement positif sur le dossier présenté par l’ANDRA, elle émet un certain nombre de recommandations pour la finalisation des études de conception détaillées et le dossier de demande d’autorisation de création, en appelant à une association encore plus étroite d’EDF, d’Orano et du CEA à ces travaux.

Selon le planning de l’ANDRA, la demande de création de Cigéo (Installation nucléaire de base), précédemment prévue pour 2021, devrait désormais intervenir en 2022, décalant d’autant l’obtention de l’autorisation de création, prévue aujourd'hui pour 2025. Les producteurs ont en revanche toujours en référence, à ce stade, une réception des premiers colis de déchets en 2031.

Après un dépôt en août 2020 par l’ANDRA, son instruction par les services de l’État et l’objet d’une enquête publique qui s’est tenue du 15 septembre au 23 octobre 2021, le dossier de demande de déclaration d’utilité publique (DUP) pour le centre de stockage Cigéo, a reçu un avis favorable des commissaires enquêteurs sans réserve le 20 décembre 2021. La publication du décret de DUP, emportant mise en compatibilité des documents d’urbanisme est attendue début 2022.

Enfin, la loi de finances pour 2021 publiée au Journal officiel le 30 décembre 2020 prévoit une évolution de la fiscalité du projet (passage d’une fiscalité basée sur le droit commun à une fiscalité basée sur la taxe de stockage). Les dispositions associées restent à préciser et à encadrer par l’État de sorte à éviter une augmentation du coût du projet Cigéo à ce titre.

Il est par ailleurs à noter que depuis le 31 décembre 2020, afin de se mettre en cohérence avec la dernière nomenclature telle qu’annexée à l’arrêté modifié du 21 mars 2007 relatif à la sécurisation du financement des charges nucléaires, la provision constituée pour les déchets HA-MAVL couvre également le conditionnement et l’entreposage intermédiaire des déchets MAVL à ICEDA (Installation de Conditionnement et d’Entreposage des Déchets Activés). Ces charges nucléaires étaient auparavant couvertes par les provisions « reprise et conditionnement des déchets ».

L’installation construite sur le site de la centrale de Bugey a reçu ses premiers colis en septembre 2020 après l’autorisation de mise en service accordée par l’ASN le 28 juillet 2020. Le 19 juillet 2021 a été réceptionnée la décision de l'ASN approuvant et encadrant le conditionnement en colis à ICEDA des déchets MAVL. À fin 2021, les premiers colis de déchets ont été scellés conformément aux autorisations reçues et au planning de mise en service.

28.3 Provisions pour déconstruction des centrales nucléaires

EDF assume la responsabilité technique et financière de la déconstruction des installations nucléaires de base (INB) dont il est exploitant. Le processus d'arrêt définitif et de démantèlement est encadré par les dispositions législatives des articles L. 593-20 à L. 593-25 et réglementaires des articles R. 593-65 à R. 593-74 du Code de l’environnement. Pour une INB donnée, il se caractérise par :

  • une déclaration d’arrêt définitif au moins deux ans avant la date d’arrêt envisagée ;
  • depuis la loi de transition énergétique (LTE) du 17 août 2015, la mise à l'arrêt définitif (MAD), qui a lieu pendant la phase de fonctionnement de l’INB, est considérée séparément du démantèlement, comme une modification notable de moindre importance (nécessitant simplement une déclaration de l’exploitant au ministre et à l’ASN) ;
  • la constitution par l’exploitant d’un dossier de démantèlement adressé au ministre chargé de la sûreté nucléaire, conduisant, après instruction par les autorités et enquête publique, à un décret prescrivant le démantèlement, permettant l’engagement des opérations de démantèlement ;
  • des points d’étape clés soumis à l’accord de l’ASN, avec un dossier de sûreté propre aux opérations de démantèlement devant être réalisées ;
  • un processus de contrôle interne des modifications notables mis en place par l'exploitant, pour les opérations soumises à déclaration ou autorisation de l’ASN ;
  • enfin, une fois les opérations terminées, le déclassement de l’installation, la faisant sortir du régime juridique des installations nucléaires de base.

Le scénario de déconstruction retenu par EDF est conforme au Code de l’environnement, qui impose un délai aussi court que possible entre l’arrêt définitif de l’installation et son démantèlement dans des conditions économiquement acceptables et dans le respect des principes énoncés à l’article L. 1333-1 du Code de la santé publique (radioprotection) et au chapitre II de l’article L. 110-1 du Code de l’environnement (protection de l’environnement). L’état final visé est celui d'un usage industriel : les sites seront remis en état et les terrains pourront être réutilisés pour un usage industriel.

Les opérations de démantèlement en cours concernent principalement les centrales qui ont été construites et exploitées avant le parc nucléaire actuellement en fonctionnement, dites centrales de « première génération », ainsi que la centrale de Superphénix et l’Atelier des Matériaux Irradiés. Ces opérations couvrent quatre technologies différentes de réacteurs : réacteur à eau lourde (Brennilis), réacteur à neutrons rapides refroidi au sodium (Superphénix à Creys-Malville), réacteur modéré au graphite et refroidi au gaz (réacteurs UNGG à Chinon, Saint Laurent et Bugey) et réacteur à eau pressurisée (« REP » à Chooz). Ces opérations constituent des premières pour EDF et à l’exception du REP de Chooz, elles concernent des technologies de réacteurs pour lesquelles le retour d'expérience international est faible voire inexistant. Elles nécessitent donc le développement de méthodes et technologies nouvelles, qui comportent un risque plus important que des technologies disposant déjà d’un retour d’expérience. La déconstruction du REP à Chooz bénéficie d’un retour d’expérience (essentiellement américain et limité) mais la centrale présente la particularité de se situer dans une caverne, ce qui en fait également une opération singulière pour laquelle le retour d’expérience n’est pas immédiatement transposable et qui comprend des enjeux spécifiques.

Les opérations en cours sur les installations arrêtées (en particulier le retour d’expérience acquis sur le REP de Chooz), les études d’avant-projet sommaire des 2 tranches 900 MWe de Fessenheim, ainsi que les travaux préparatoires au démantèlement, ont permis à fin 2021 de faire un chiffrage détaillé de la référence de l’estimation des coûts futurs de la déconstruction du parc nucléaire actuellement en fonctionnement (centrales de « deuxième génération »). Pour autant, ni EDF, ni aucun autre opérateur, n’a aujourd’hui engagé un programme de déconstruction à une échelle comparable à celle du parc REP actuel et les estimations comportent donc à la fois des opportunités et des risques notamment associés à cet effet d'échelle.