Document d'Enregistrement Universel 2021

2. Facteurs de risques et cadres de maîtrise

5B – Maîtrise du traitement des déchets radioactifs et de la déconstruction des installations nucléaires, et sécurisation des engagements associés

Résumé : Les provisions constituées par le Groupe pour les opérations de déconstruction des installations nucléaires ainsi que pour le traitement et le stockage ultime des déchets radioactifs, y compris les déchets à vie longue issus du traitement des combustibles usés et de la déconstruction, pourraient s’avérer insuffisantes. En particulier, la déconstruction du parc nucléaire existant pourrait présenter des difficultés qui ne sont pas envisagées aujourd’hui ou s’avérer sensiblement plus coûteuse que ce qui est prévu. En outre, ces opérations doivent répondre à l’enjeu de la RSE relatif à la gestion des déchets et à l’économie circulaire.

Le montant des actifs dédiés en France constitués par le Groupe pour couvrir les coûts de ses engagements de long terme dans le nucléaire (déchets radioactifs et déconstruction) pourrait s’avérer insuffisant en cas de révision à la hausse des provisions associées ou en cas d’évolution défavorable de la valeur des actifs dédiés. Dans un tel cas, ce montant devrait être complété, ce qui aurait un impact négatif sur le cash-flow, les résultats et les perspectives du Groupe.

Criticité : ●● Intermédiaire

a) Déconstruction

Les opérations de déconstruction en cours en France (voir section 1.4.1.1.2.3 « Les enjeux du nucléaire ») concernent les centrales qui ont été construites et exploitées et sont désormais définitivement arrêtées, y compris la centrale Superphénix et celle de Fessenheim définitivement arrêtée en 2020. Ces opérations couvrent quatre technologies différentes de réacteurs : réacteur à eau lourde (Brennilis), réacteur rapide refroidi au sodium (Superphénix à Creys-Malville), réacteur modéré au graphite et refroidi au gaz (réacteurs UNGG à Chinon, Saint Laurent et Bugey) et réacteur à eau pressurisé (« REP » à Chooz A et Fessenheim).

Au Royaume-Uni, les deux réacteurs de Dungeness ont été définitivement arrêtés le 7 juin 2021, ceux de Hunterston B respectivement le 26 novembre 2021 et le 7 janvier 2022. En vertu des accords conclus lors de la restructuration de British Energy, les coûts liés à la déconstruction des centrales nucléaires existantes d'EDF Energy Nuclear Generation Group Ltd. seront supportés par le Nuclear Liabilities Fund (NLF) et, si les actifs de ce dernier étaient insuffisants, par le gouvernement britannique (voir la section 1.4.5.1.2.2 « Production nucléaire »). En 2019, EDF Energy et le gouvernement britannique (BEIS) ont entamé des discussions en vue de préciser les conditions de mise en œuvre de ces accords, notamment la définition des coûts de démantèlement à recouvrer par EDF Energy auprès du Nuclear Liabilities Fund ainsi que les conditions d’exercice par les autorités britanniques de l'option qu’elles détiennent d’acquérir les centrales nucléaires à l’issue de la phase de déchargement du combustible. En juin 2021 un accord a été conclu avec le gouvernement, qui précise le rôle d’EDF Energy pour la phase d’évacuation du combustible, comment et quand les coûts seront recouvrés, et les conditions selon lesquelles les centrales seront transférées au gouvernement. Cet accord met à jour le Nuclear Liabilities Fund Agreement (NLFA).

Risques principaux
  • Les opérations de déconstruction en cours en France constituent des premières pour EDF et, à l’exception du REP, elles concernent des technologies de réacteurs pour lesquelles le retour d’expérience international est faible voire inexistant. Elles nécessitent donc le développement de méthodes et technologies nouvelles qui comportent un risque plus important que des technologies disposant déjà d’un retour d’expérience.
  • Ni EDF, ni aucun autre opérateur, n’a aujourd’hui engagé un programme de déconstruction à une échelle comparable à celle du parc REP actuel du Groupe ; les estimations de coûts comportent donc des risques qui sont notamment associés à cet effet d’échelle.
  • Le calendrier et le coût des travaux sont dépendants des autorisations administratives et de la disponibilité, au moment nécessaire, des centres de stockage de déchets radioactifs ou d’autres installations nécessaires au conditionnement, au traitement ou à l’entreposage des colis de déchets.
  • Les incertitudes et aléas techniques, industriels ou administratifs pouvant affecter les projets de déconstruction et la gestion des déchets pourraient avoir des répercussions sur le montant des provisions actuellement constituées. En outre, l’évaluation du montant de ces provisions est sensible aux hypothèses retenues de coûts, de planning, de taux d’inflation et de taux d’actualisation à long terme, ainsi qu’à toute évolution de la réglementation, concernant en particulier le périmètre des charges à couvrir. Le montant de ces provisions, conformément au Code de l’environnement, fait l’objet d’un contrôle par l'autorité administrative, qui vérifie en particulier la suffisance des charges provisionnées et impose un plafond au taux d’actualisation des provisions.

    Ces incertitudes et aléas pourraient conduire à une révision significative des montants provisionnés, et les provisions constituées pourraient ne pas couvrir les coûts effectivement constatés le moment venu. La non-maîtrise du montant des dépenses, de l’échéancier de réalisation et des provisions financières relatives aux opérations de déconstruction d’installations nucléaires dont le Groupe est responsable, aurait un impact négatif sur la situation financière et la réputation du Groupe (voir note 15 de l’annexe aux comptes consolidés de l'exercice clos le 31 décembre 2021).

  • Au Royaume-Uni, les accords en vigueur prévoient que les dépenses liées au déchargement et à l’évacuation du combustible pour être couvertes par le NLF, soient justifiées par EDF Energy et approuvées par le Gouvernement ; à défaut elles resteraient à la charge d’EDF Energy.
  • Concernant les centrales nucléaires dont EDF n’est pas en charge de l'exploitation,  mais possède des participations financières (Chine et Belgique), le Groupe est exposé financièrement à hauteur de sa participation à contribuer aux charges futures de démantèlement.
Actions de maîtrise
  • Le retour d’expérience acquis sur le REP de Chooz A permet de rendre robustes autant que possible les études et l’estimation des coûts futurs de la déconstruction du parc nucléaire actuellement en fonctionnement et de Fessenheim (centrales de « deuxième génération »).
  • Le Groupe procède régulièrement à une mise à jour des principales hypothèses sous-jacentes aux provisions (voir note 15 de l’annexe aux comptes consolidés de l’exercice clos le 31 décembre 2021).
  • L’audit de 2020-2021 de la DGEC sur les installations arrêtées à fin 2019, a conclu que « le processus de chiffrage et de révision annuelle est robuste, et permet une bonne traçabilité des hypothèses utilisées et des données d’origine. Les provisions sont cohérentes avec les scénarios de base des projets et couvrent le périmètre complet des charges du périmètre audité ».
  • La gouvernance en matière de sécurisation du financement des charges nucléaires a été renforcée par l’élaboration d’une politique Groupe, validée par le Conseil d’administration du 30 juin 2021, et la création en 2021 d'une Fonction de contrôle de l’évaluation des charges nucléaires conformément au décret 2020-830 du 1er juillet 2020.
  • Au Royaume-Uni, le risque relatif au recouvrement des coûts de déconstruction a été significativement réduit par l’accord avec le gouvernement. Les actions de maîtrise de risque complémentaires sont :
    • le maintien de la qualité des relations avec le gouvernement et la NDA (Nuclear Decommissioning Authority) ;
    • le renforcement des dispositifs de surveillance et de conformité contractuelle, ainsi que du reporting et du management de la performance.
b) Gestion des déchets

En France, EDF est responsable de tous les déchets radioactifs produits durant :

  • l’exploitation des installations nucléaires que le Groupe exploite ;
  • les opérations de traitement des combustibles usés provenant des réacteurs exploités par EDF ;
  • les opérations de déconstruction des installations nucléaires que le Groupe exploite (voir en section 1.4.1.1.2.3 « Les enjeux du nucléaire » – Le stockage des déchets ultimes conditionnés).

À ce titre EDF a constitué des provisions pour la gestion à long terme des déchets. Pour chaque catégorie de déchets (haute, moyenne, faible ou très faible activité) une filière de gestion spécifique est identifiée.