Document d'Enregistrement Universel 2021

2. Facteurs de risques et cadres de maîtrise

Le réseau RIN au sein d’EDF (risques industriels et naturels) s’assure du suivi, de l'appropriation et de l’intégration des nouvelles exigences sur les sites.

Le Groupe s’engage par ailleurs en faveur de la biodiversité à travers ses enjeux de responsabilité sociétale d’entreprise relatifs à la préservation des ressources de la planète (voir la section 3.2).

2.2.5 Risques spécifiques aux activités nucléaires

5A – Non-respect des objectifs d’exploitation et/ou de poursuite de fonctionnement des parcs nucléaires (France et Royaume-Uni)

Résumé : Le Groupe pourrait ne pas atteindre les objectifs d’exploitation de ses parcs nucléaires, en termes de sûreté et de disponibilité notamment en cas de réparations ou modifications sur le parc nucléaire français à la suite de contrôle ou de détection de défauts. Il pourrait aussi ne pas poursuivre l’exploitation de ses réacteurs au-delà de l’échéance prévue actuellement, voire ne plus être autorisé à les exploiter jusqu’à cette échéance en France comme au Royaume-Uni. Le Groupe pourrait par ailleurs ne pas réussir à maîtriser, en coûts et délais, ses opérations de mise à niveau du parc en exploitation (« Grand Carénage » en France) ce qui représente un risque majeur pour le Groupe.

Criticité : ●●● Forte

a) Contexte

En France, le parc de réacteurs nucléaires actuellement exploités par le Groupe est très standardisé (voir section 1.4.1.1.2.1 « Le parc nucléaire d’EDF en France et son exploitation »). Ceci permet notamment au Groupe de réaliser des économies d'échelle, de répercuter sur l’ensemble de son parc les améliorations effectuées sur les réacteurs plus récents et d’anticiper, en cas de dysfonctionnement sur un réacteur, les mesures à prendre sur les autres. Le Groupe vise depuis plusieurs années à poursuivre l'exploitation de son parc nucléaire en France au-delà de 40 ans.

Le 15 décembre 2021, EDF a annoncé avoir détecté des phénomènes dits de « corrosion sous contrainte » à proximité de soudures des tuyauteries du circuit d'injection de sécurité (RIS) dans le cadre de la visite décennale du réacteur n°1 de la centrale de Civaux. Des défauts similaires ont été détectés dans d'autres centrales. Ces phénomènes engendrent des arrêts et des contrôles non prévus et ont un impact important sur la production nucléaire dont les conséquences à moyen terme sont difficiles à évaluer.

À l’occasion des réexamens périodiques effectués lors des visites décennales (VD) et à la suite de l’accident de Fukushima au Japon, le Groupe a élaboré un important programme de travaux, appelé « Grand Carénage », dont le principe a été approuvé en Conseil d’administration (Voir section 1.4.1.1.2 « Production nucléaire d'électricité en France »).

Suite à la décision de l’État d’arrêter par anticipation la centrale nucléaire de Fessenheim, les 2 réacteurs ont été définitivement arrêtés en 2020.

Au Royaume-Uni, la durée actuellement prévue pour l’exploitation des réacteurs du parc nucléaire existant d’EDF Energy varie entre 41 et 47 années calendaires pour les réacteurs avancés au gaz (RAG) et est de 40 ans pour le réacteur à eau pressurisée (REP) de Sizewell B. Depuis leur acquisition par EDF Energy, la durée de fonctionnement des réacteurs RAG a été allongée de 8 ans environ en moyenne, et l'objectif pour la centrale REP est de poursuivre son fonctionnement durant 20 ans après les 40 ans actuellement prévus (voir section 1.4.5.1.2.2 « La Production nucléaire »). Les deux réacteurs de Dungeness ont été définitivement arrêtés le 7 juin 2021, ceux de Hunterston B respectivement le 26 novembre 2021 et le 7 janvier 2022.

b) Risques principaux
Parc nucléaire en France
  • La standardisation du parc a pour corollaire le risque d’un dysfonctionnement commun à plusieurs réacteurs ou à une génération ou encore à un palier de réacteurs (voir section 1.4.1.1.2 « Exploitation du parc nucléaire et performances techniques »).
  • Le Groupe pourrait être confronté à des réparations génériques ou des modifications lourdes et coûteuses à effectuer sur l’ensemble ou sur une partie du parc. Des événements ayant un impact sur le fonctionnement du parc ou sur sa production pourraient également survenir et entraîner un arrêt momentané ou la fermeture de tout ou partie du parc.

En particulier, la détection d'indications (dites de « corrosion sous contrainte ») évoquées ci-dessus a entraîné la mise à l’arrêt de réacteurs du palier N4. Les contrôles préventifs réalisés ont fait apparaître des indications similaires sur d'autres réacteurs. La réalisation des contrôles, pour partie destructifs, l'instruction de solutions techniques et leur déploiement ont conduit EDF, en concertation avec l'ASN, à établir en février 2022 une liste priorisée des réacteurs sur lesquels des contrôles seront repris avec des moyens optimisés et la prise en compte du retour d'expérience

La liste des tuyauteries potentiellement concernées par ces indications n’est pas encore arrêtée. Ainsi, le programme de contrôles et de réparations des tuyauteries potentiellement concernées par le phénomène de corrosion sous contrainte constitue la matérialisation d’un risque majeur en termes de production nucléaire. Il a conduit le Groupe à revoir son estimation de production nucléaire pour 2022 et 2023. A date, le Groupe n’est pas en capacité d’analyser les impacts au-delà de 2023 (1).

Les contrôles pourraient être encore étendus au sein du parc nucléaire, en étroite concertation avec l’ASN. Ils pourraient se traduire par de nouvelles investigations et entraîner des réparations potentiellement longues et coûteuses.

  • Pour chaque réacteur, lors des réexamens périodiques, l’ASN se prononce sur les dispositions prises par l’exploitant et peut édicter des prescriptions complémentaires. Des solutions sont étudiées pour démontrer la capacité des équipements non remplaçables, à savoir les enceintes de confinement et les cuves des réacteurs, à assurer leur fonction jusqu’à 60 ans. Ces études, qui s'appuient sur les données disponibles en France, mais également à l'international (2) permettent de confirmer les marges de sûreté disponibles pour les durées de fonctionnement en cours d’instruction, mais peuvent également conduire à devoir adopter, le cas échéant, des mesures conservatoires complémentaires à prendre sur le parc existant, ce qui pourrait avoir des conséquences sur sa performance.
  • Dans sa décision du 23 février 2021 sur les conditions de la poursuite de fonctionnement des réacteurs de 900 MWe d’EDF au-delà de leur quatrième réexamen périodique, l’ASN considère que les dispositions prévues par EDF, complétées par les réponses aux prescriptions formulées par l’ASN, permettront d'atteindre les objectifs du réexamen et que ces améliorations de sûreté ouvrent la perspective d’une poursuite de fonctionnement des réacteurs de 900 MWe pour dix ans au-delà de ce quatrième réexamen périodique moyennant la mise en œuvre de dispositions complémentaires. Ces nouvelles demandes induisent une augmentation des investissements et une charge industrielle supplémentaire de l’ordre de 25 % par rapport au programme initial déjà très ambitieux, augmentant le risque sur la capacité à faire des industriels dans les  délais prescrits.
  • Conformément au Code de l’environnement, les dispositions proposées par EDF lors des réexamens au-delà de la 35e année de fonctionnement seront soumises, réacteur par réacteur, après enquête publique, à autorisation de l'ASN. Pour Tricastin 1, dont la VD4 (tête de série) s’est terminée par le recouplage le 23 décembre 2019, le rapport de conclusions de réexamen périodique (RCR) a été transmis en février 2020, et fera l’objet d’une enquête publique du 13 janvier au 14 février 2022, après publication de l’avis ASN générique sur la VD4. L’avis ASN sur le RCR Tricastin 1 devrait être émis fin 2022. À fin 2021, les VD4 des réacteurs de Tricastin 1, Bugey 2, Bugey 4 et Tricastin 2 sont terminées et les VD4 de Dampierre 1, Bugey 5 et Gravelines 1 sont en cours. Chacun des avis ASN est susceptible de comporter des demandes spécifiques au site en complément des prescriptions de l'avis générique avec un impact sur la charge industrielle et les coûts.

(1) Voir les communiqués de presse d’EDF des 7 et 11 février 2022.

(2) Quatre réacteurs aux États-Unis ont obtenu une licence d’exploitation jusqu’à 80 ans. Pour six autres la demande de licence est en cours d’instruction : The Nuclear Regulatory Commission (NRC) staff has defined subsequent license renewal (SLR) to be the period of extended operation from 60 years to 80 years ( www.nrc.gov/reactors/operating/licensing/renewal/subsequent-license-renewal.html).