Document d’enregistrement universel 2020

6. États financiers

Sur la base des estimations de coûts réalisées sur les différents postes de coûts, le devis de référence à terminaison (en euros 2020) de 2 tranches TTS 900 MW (Fessenheim) s’élève à environ 0,8 milliard d’euros, soit 0,4 milliard d’euros en moyenne pour une tranche TTS 900 MW à comparer au 0,35 milliard d’euros de coût moyen pour le parc REP complet en tenant compte des effets de série et mutualisation décrits précédemment.

Pour les centrales nucléaires définitivement arrêtées

À l’exception des deux réacteurs de la centrale de Fessenheim (pour lesquels les provisions sont évaluées suivant les modalités du parc REP en exploitation décrites plus haut), le démantèlement des autres réacteurs à l’arrêt représente des opérations pilotes correspondant à quatre technologies différentes et présentant des spécificités marquées : REP à Chooz A (mais inséré dans une caverne), Uranium Naturel – Graphite – Gaz (UNGG) à Bugey, Saint-Laurent et Chinon, eau lourde à Brennilis, et réacteur à neutrons rapides refroidi au sodium à Creys-Malville.

Les coûts de déconstruction sont évalués à partir de devis, qui prennent en compte le retour d’expérience industriel, les aléas et évolutions réglementaires, et les dernières données chiffrées disponibles. Ils sont revus annuellement depuis 2015. En 2015, la stratégie industrielle de démantèlement des centrales UNGG a été totalement revue. La stratégie précédemment retenue reposait sur un scénario de démantèlement des caissons (bâtiments réacteurs UNGG) « sous eau », pour quatre d’entre eux, avec stockage direct du graphite dans un centre en cours d’étude par l’ANDRA (voir note 28.2 « Déchets FAVL »). Un ensemble de faits techniques nouveaux a fait apparaître que la solution alternative d’un démantèlement « sous air » des caissons était de nature à permettre une plus grande maîtrise industrielle des opérations et se présentait plus favorablement au regard des enjeux de sécurité, de radioprotection et d’environnement. Un scénario de démantèlement de l’ensemble des six caissons « sous air » a donc été retenu comme nouvelle référence par l’entreprise. Ce scénario intègre la consolidation du retour d’expérience après le démantèlement d’un premier caisson, avant d’engager celui des cinq autres. Il conduit au final à une phase de déconstruction plus longue que précédemment envisagée, conduisant à un renchérissement du devis du fait des coûts d’exploitation induits.

La mise à jour du scénario industriel de démantèlement des centrales définitivement arrêtées, en particulier celui relatif aux UNGG, a conduit à augmenter la provision de 590 millions d’euros au 31 décembre 2015.

En 2016, la révision des provisions des centrales définitivement arrêtées a donné lieu à des ajustements non significatifs, à l’exception d’une augmentation de 125 millions d’euros pour une installation particulière (Atelier des Matériaux Irradiés de Chinon). En 2017 et 2018, cette revue a donné lieu à des ajustements non significatifs.

L’évolution du scénario industriel de démantèlement des réacteurs UNGG opérée en 2015 a été présentée au collège des commissaires de l’ASN le 29 mars 2016.

En 2018, l’ASN a fait part de ses principales questions et conclusions sur le dossier de stratégie UNGG. Le démantèlement sous air de l’ensemble des réacteurs, l’intérêt d’un démonstrateur industriel, et le planning du premier réacteur démantelé « tête de série » (Chinon A2) ont fait l’objet d’un consensus. Les échanges se sont poursuivis en revanche sur le planning de démantèlement des 5 autres réacteurs. Le planning proposé par EDF permet de disposer d’un retour d’expérience significatif (démantèlement d’un premier réacteur) avant de démarrer le démantèlement quasi simultané des 5 autres réacteurs. EDF a été auditionnée le 12 février 2019 par le collège des commissaires de l’ASN sur ce sujet particulier afin de présenter l’ensemble des éléments soutenant le calendrier retenu. Sur cette base, des projets de décision de l’ASN ont été soumis à consultation du public de juillet à novembre 2019. Ces projets prescrivent la date de dépôt des dossiers réglementaires qui permettront d’autoriser les travaux de démantèlement ainsi que le programme de démantèlement qui doit être intégré dans ces dossiers. Dans ces projets, l’ASN reconnaît la complexité des opérations à mener, le bien-fondé de la stratégie de maîtrise des risques proposée par EDF (démonstrateur industriel, retour d’expérience conséquent sur un premier réacteur). Elle demande toutefois une légère anticipation des travaux sur les 5 réacteurs suivant la tête de série, pour lesquels les travaux doivent avoir commencé en 2055.

En 2019, la prise en compte de ces projets de décision a conduit globalement à augmenter les provisions nucléaires de 108 millions d’euros, dont 77 millions d’euros concernent la provision pour déconstruction des centrales nucléaires et 31 millions d’euros concernent la provision GLTD (déchets FAVL, TFA et FMA).

Les décisions de l’ASN relatives au démantèlement des réacteurs UNGG ont été publiées le 17 mars 2020, sans remise en cause des principes inscrits dans les projets de décision de 2019. Les provisions nucléaires au titre de la déconstruction des UNG n’ont en conséquence pas fait l’objet de réévaluation particulière à ce titre en 2020 et reflètent la meilleure estimation du scénario industriel et technique.

En 2020, la revue annuelle des devis des centrales définitivement arrêtées a notamment amené à une augmentation des provisions de 45 millions d’euros au titre de retards sur le chemin critique suite à l’arrêt des chantiers lors de la 1re phase de confinement et suite à un aléa majeur en lien avec l’arrêt du chantier de découpe des internes de Chooz A. Une mise à jour des coûts sur l’assainissement du génie civil a été également réalisée, conduisant à une augmentation des provisions de 43 millions d’euros au périmètre des installations arrêtées dans leur ensemble.

Enfin, conformément aux prérogatives fixées par l’article 594-4 du Code de l’environnement, la Direction Générale de l’Énergie et du Climat (DGEC) a commandité en juin 2020 la réalisation d’un audit externe sur l’évaluation du démantèlement des installations nucléaires arrêtées d’EDF, conduit par un consortium de cabinets spécialisés. L’audit a commencé début décembre 2020 et est appelé à se dérouler jusqu’à juillet 2021.

Au 31 décembre 2020, les montants bruts évalués aux conditions économiques de fin de période (reste à dépenser) et les montants en valeur actualisée, sont les suivants par technologie de réacteurs :

 

31/12/2020

(en millions d’euros)

Montants des charges aux conditions économiques de fin de période

Montants provisionnés en valeur actualisée

Réacteur à eau pressurisée REP – Chooz A

Réacteur à eau pressurisée REP – Chooz A

31/12/2020

215

176

Réacteur à eau pressurisée – Fessenheim *

Réacteur à eau pressurisée – Fessenheim *

31/12/2020

810

689

Réacteurs Uranium – Graphite – Gaz – UNGG Bugey, Saint Laurent, Chinon

Réacteurs Uranium – Graphite – Gaz – UNGG Bugey, Saint Laurent, Chinon

31/12/2020

5 352

2 967

Réacteur à eau lourde – Brennilis

Réacteur à eau lourde – Brennilis

31/12/2020

321

276

Réacteur à neutrons rapides refroidi au sodium – Superphénix à Creys Malville

Réacteur à neutrons rapides refroidi au sodium – Superphénix à Creys Malville

31/12/2020

557

494

* Hors entreposage intermédiaire et traitement des générateurs de vapeur.

Les provisions pour déconstruction des centrales nucléaires arrêtées comprennent également les coûts de déconstruction d’installations annexes comme l’Atelier pour l’Entreposage du Combustible (APEC) à Creys Malville, et la Base chaude opérationnelle du Tricastin (BCOT).

Comparé aux coûts de déconstruction pour la technologie REP, le coût de déconstruction à terminaison (ensemble des coûts réalisés et restant à dépenser) des autres réacteurs est plus élevé en fonction de leurs caractéristiques :

  • environ deux fois plus pour Brennilis (environ 0,85 milliard d’euros de coût à terminaison pour un réacteur), en raison de sa compacité, d’un cœur enchâssé dans du béton donc difficile d’accès, de l’absence de piscine qui rend les découpes avec des moyens télé-opérés plus complexes, et de la présence de zircaloy (risque incendie) qui impose des cadences de découpe réduites et un contrôle renforcé ;
  • environ deux fois plus pour les réacteurs UNGG (environ 6,4 milliards d’euros de coût à terminaison pour 6 réacteurs), qui nécessitent d’évacuer 20 fois plus de matériaux que pour un REP en raison de leur taille, et dont la difficulté d’accès et la gestion particulière du graphite nécessitent le développement de moyens télé-opérés spécifiques ;
  • environ quatre fois plus pour Creys-Malville (environ 1,8 milliard d’euros de coût à terminaison pour un réacteur), en raison du traitement du sodium, très délicat à éliminer, et de la taille des installations, en particulier celle du réacteur (sa cuve est 20 fois plus grande que celle d’un REP 1300 MW).