En 2016, EDF a effectué une révision du devis de démantèlement afin de prendre en compte, d’une part, les recommandations de l’audit, qui lui avaient été adressées, et d’autre part, le retour d’expérience des opérations de démantèlement des réacteurs de première génération (en particulier Chooz A).
Le travail de révision du devis a consisté en la mise en œuvre d’une démarche analytique détaillée, identifiant l’ensemble des coûts d’ingénierie, de travaux, d’exploitation et de traitement des déchets liés au démantèlement futur des réacteurs en cours de fonctionnement. Il a permis d’aboutir à un chiffrage reposant sur des chroniques détaillées de démantèlement des centrales. La démarche adoptée a permis d’approfondir l’évaluation des coûts propres aux têtes de série, estimés pour chaque palier à partir de coefficients de transposition appliqués au coût de référence de la tête de série 900 MW, ainsi que les effets de série et de mutualisation, ces coûts et effets étant en effet inhérents à la taille et à la configuration du parc.
Les natures des principaux effets de série et de mutualisation et de série retenus dans les chiffrages du devis sont explicitées ci-dessous.
Les effets de série (effet sur les sites suivants le site tête de série d’un même palier) sont principalement de deux natures différentes :
Les effets de mutualisation (effets entre les différentes tranches présentes sur un même site qu’elles soient en exploitation ou en démantèlement) sont quant à eux de différentes natures :
Ainsi, du fait de l’effet de mutualisation, le démantèlement d’une paire de réacteurs sur un même site coûte moins cher que le démantèlement de deux réacteurs isolés sur deux sites différents. En France, à la différence des autres pays, il n’y a pas de réacteurs isolés mais des sites avec 2, 4 et dans un cas, 6 réacteurs.
Les effets de série et de mutualisation sont respectivement de 10 % et de 6 % sur le devis par rapport à un devis qui ne prendrait en compte aucun effet de série (resp. mutualisation). Ces effets varient selon les paliers, les effets seront d’autant plus importants en fonction de nombre de tranches d’un palier (effet de série) et du nombre de tranches par site (effet mutualisation), ce qui conduit à des effets sur le palier 900 supérieurs à 16 % (effets de série et mutualisation).
Les effets de série et de mutualisation, notamment, permettent d’expliquer pourquoi une simple comparaison des coûts moyens de démantèlement par réacteur entre le parc français et les parcs nucléaires d’autres pays n’est pas pertinente.
A contrario, les chiffrages n’intègrent que de façon très marginale l’évolution de la productivité et l’effet d’apprentissage. L’audit externe mandaté par la DGEC sur le coût de démantèlement du parc en exploitation avait à cet égard considéré que cette option représentait une prudence d’estimation.
Le devis intègre également, par prudence, une évaluation des risques et incertitudes de la façon suivante :
La méthode retenue ci-dessus pour l’évaluation des risques et incertitudes aboutit à une marge globale de l’ordre de 16,5 % pour l’ensemble du parc (20 % pour la tête de série 900).
La démarche ainsi mise en œuvre en 2016 et les résultats des travaux avaient été présentés à l’autorité administrative et fait l’objet de questions complémentaires et d’échanges.
Les résultats de cette démarche détaillée ont conduit, au global, à des évolutions limitées du devis et des provisions associées au 31 décembre 2016 – hors conséquences de la modification de la durée d’amortissement des centrales du palier 900 MW (hors Fessenheim) au 1er janvier 2016 et hors effet lié à l’évolution du taux d’actualisation au 31 décembre 2016 – à savoir :
Après sa révision en 2016, il a été prévu que le devis ferait l’objet d’une revue annuelle. Depuis 2017, cette revue a donné lieu à des ajustements annuels de devis non significatifs.
Par ailleurs, EDF continue à conforter ses analyses par une intercomparaison internationale prenant soin d’identifier et de caractériser un certain nombre d’éléments pouvant fausser des comparaisons directes comme notamment les différences de périmètres des devis ou les contextes nationaux et réglementaires.
Il est par ailleurs à noter en 2020 les mouvements suivants sur les provisions pour déconstruction des centrales nucléaires en exploitation, hormis le reclassement de la provision relative à la centrale de Fessenheim en provision pour déconstruction des centrales arrêtées :
Sur la base des estimations de coûts réalisées sur les différents postes de coûts, le devis de référence à terminaison (en euros 2020) de 2 tranches TTS 900 MW (Fessenheim) s’élève à environ 0,8 milliard d’euros, soit 0,4 milliard d’euros en moyenne pour une tranche TTS 900 MW à comparer au 0,35 milliard d’euros de coût moyen pour le parc REP complet en tenant compte des effets de série et mutualisation décrits précédemment.
À l’exception des deux réacteurs de la centrale de Fessenheim (pour lesquels les provisions sont évaluées suivant les modalités du parc REP en exploitation décrites plus haut), le démantèlement des autres réacteurs à l’arrêt, représente des opérations pilotes correspondant à quatre technologies différentes et présentant des spécificités marquées : REP à Chooz A (mais inséré dans une caverne), Uranium Naturel – Graphite –Gaz (UNGG) à Bugey, Saint-Laurent et Chinon, eau lourde à Brennilis, et réacteur à neutrons rapides refroidi au sodium à Creys-Malville.
Les coûts de déconstruction sont évalués à partir de devis, qui prennent en compte le retour d’expérience industriel, les aléas et évolutions réglementaires, et les dernières données chiffrées disponibles. Ils sont revus annuellement depuis 2015. En 2015, la stratégie industrielle de démantèlement des centrales UNGG a été totalement revue. La stratégie précédemment retenue reposait sur un scénario de démantèlement des caissons (bâtiments réacteurs UNGG) « sous eau », pour quatre d’entre eux, avec stockage direct du graphite dans un centre en cours d’étude par l’ANDRA (voir note 15.1.1.2.2 « Déchets FAVL »). Un ensemble de faits techniques nouveaux a fait apparaître que la solution alternative d’un démantèlement « sous air » des caissons était de nature à permettre une plus grande maîtrise industrielle des opérations et se présentait plus favorablement au regard des enjeux de sécurité, de radioprotection et d’environnement. Un scénario de démantèlement de l’ensemble des six caissons « sous air » a donc été retenu comme nouvelle référence par l’entreprise. Ce scénario intègre la consolidation du retour d’expérience après le démantèlement d’un premier caisson, avant d’engager celui des cinq autres. Il conduit au final à une phase de déconstruction plus longue que précédemment envisagée, conduisant à un renchérissement du devis du fait des coûts d’exploitation induits.