L’ambition industrielle d’EDF quant à la préparation de l’avenir du parc nucléaire s’appuie notamment sur les axes stratégiques suivants :
Le 15 septembre 2011, suite à l’accident de la centrale nucléaire de Fukushima au Japon, EDF a remis à l’ASN, sur sa demande, un rapport d’évaluations complémentaires de sûreté (ECS) pour chacun de ses 19 sites de production nucléaire, englobant les réacteurs en exploitation et ceux en construction.
Ces évaluations ont consisté à réinterroger les défenses des centrales existantes et en construction, à la lumière des événements qui ont eu lieu au Japon, en prenant en compte des thèmes prédéfinis dans le cahier des charges fixé par les autorités de sûreté.
Ainsi, les marges de sûreté ont été réévaluées face aux risques de séisme et d’inondation, face à des situations de perte simultanée de la source de refroidissement et des alimentations électriques, face aux conséquences d’accidents graves.
Ces évaluations ont également amené à rechercher si certaines modifications des scénarios envisagés, au-delà des situations prises en compte pour dimensionner les systèmes de protection, conduiraient à fortement aggraver les conséquences en termes de sûreté (« effets falaise »).
Elles ont enfin amené à prendre en compte de façon déterministe des situations extrêmes qui dépasseraient sensiblement celles retenues lors de la conception des installations nucléaires et des réexamens de sûreté successifs.
La sûreté du parc nucléaire d’EDF repose en effet sur un principe d’amélioration continue : les installations existantes, comme les nouvelles, bénéficient ainsi en permanence du retour d’expérience de toutes les centrales, et tirent les enseignements des incidents et accidents qui peuvent survenir dans le monde.
Enfin, les ECS ont aussi réinterrogé les règles appliquées dans le domaine de la sous-traitance.
Ces analyses ont confirmé en premier lieu le bon niveau de sûreté de l’ensemble du parc nucléaire d’EDF, notamment du fait des réexamens périodiques, pratiqués en France depuis la fin des années 1980. EDF a également proposé des mesures complémentaires à l’ASN, allant au-delà de celles considérées pour dimensionner les systèmes de sûreté, afin d’élever encore le niveau de sûreté actuel des centrales.
Dans son avis au gouvernement publié le 3 janvier 2012, l’ASN précise, sur la base des analyses de son appui technique, qu’« à l’issue des évaluations complémentaires de sûreté des installations nucléaires prioritaires, l’ASN considère que les installations examinées présentent un niveau de sûreté suffisant pour qu’elle ne demande l’arrêt immédiat d’aucune d’entre elles ». Dans le même temps, l’ASN considère que « la poursuite de leur exploitation nécessite d’augmenter dans les meilleurs délais, au-delà des marges de sûreté dont elles disposent déjà, leur robustesse face à des situations extrêmes ».
L’ASN a également prescrit le concept de « noyau dur » et la mise en œuvre de la FARN (voir la section 1.4.1.1.2.2 « Environnement, sûreté nucléaire, radioprotection »). Le « noyau dur » sera constitué de structures, systèmes et composants de la centrale, robustes à des situations étudiées dans le cadre des ECS. Le 26 juin 2012, l’ASN a pris 19 décisions imposant à EDF plus de 600 prescriptions techniques, qui traduisent en exigences réglementaires le plan d’actions post-Fukushima. Ces prescriptions techniques prévoient que tous les sites nucléaires devront disposer d’une organisation et de locaux de crise résistant à la survenue d’un événement de grande ampleur touchant plusieurs installations. Pour les centrales d’EDF, le « noyau dur » prescrit devra notamment comprendre, pour chaque tranche, des moyens électriques « bunkerisés ». En attendant, un groupe diesel de secours provisoire a été installé sur chacune des 58 tranches dès 2013. La définition complète du « noyau dur » a fait l’objet en janvier 2014 de prescriptions techniques réglementaires de la part de l’ASN.
Les dispositions du code de l’environnement ne fixent pas de durée limite d’exploitation, mais imposent, tous les dix ans, d’apprécier la situation de l’installation au regard des règles qui lui sont applicables et d’actualiser l’appréciation des risques ou inconvénients que l’installation présente pour les intérêts protégés, en tenant compte notamment de l’état de l’installation, de l’expérience acquise au cours de l’exploitation, de l’évolution des connaissances et des règles applicables aux installations similaires (« référentiel de sûreté »).
La stratégie industrielle d’EDF est d’exploiter le parc après 40 ans, dans des conditions optimales de sûreté et de performance, compte tenu, d’une part, de l’investissement important réalisé lors des troisièmes visites décennales ainsi qu’au titre des améliorations post-Fukushima, et d’autre part des besoins énergétiques de la France. Cet objectif s’inscrit pleinement dans la tendance observée au plan international pour les centrales de technologie analogue. À cette fin, EDF a engagé des plans d’actions industriels et de R&D. Des actions sont engagées pour renouveler les gros composants qui peuvent l’être et des solutions sont étudiées pour démontrer la capacité des équipements non remplaçables, à savoir les enceintes de confinement et les cuves des réacteurs, à assurer leur fonction jusqu’à 60 ans.
La poursuite de l’exploitation du parc nucléaire actuel permettrait, dans le respect de la priorité absolue que constitue la sûreté nucléaire, et dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie, de faire le meilleur usage du patrimoine industriel qu’il constitue, et de lisser dans le temps les mises en services de centrales neuves.
Au premier semestre 2016, toutes les conditions techniques, économiques et de gouvernance nécessaires permettant de mettre en adéquation la durée d’amortissement des centrales 900 MW du parc nucléaire France avec la stratégie industrielle du Groupe étaient réunies. Le Conseil d’administration d’EDF a donc approuvé le 28 juillet 2016 l’allongement de 40 ans à 50 ans de la durée d’amortissement des centrales du palier REP 900 MW en France (hors Fessenheim) à partir du 1er janvier 2016, sans préjuger de la position de l’ASN sur les dispositions proposées par EDF pour chacune des tranches nucléaires concernées.
Cet allongement s’appuie sur la capacité technique des installations du parc REP 900 MW à fonctionner 50 ans au moins, confortée par les benchmarks internationaux, ainsi que sur les investissements progressivement engagés dans le cadre du programme « Grand Carénage » (voir dans la section 1.4.1.1.2.1 « Le programme d’investissements du parc nucléaire existant en France »). Ces investissements permettront au palier REP 900 MW d’atteindre un niveau de sûreté aussi proche que possible de celui de l’EPR et parmi les plus élevés au plan international à l’issue de leur quatrième visite décennale (VD4).
L’ASN a statué le 23 février 2021 sur les conditions de la poursuite de l’exploitation des réacteurs 900 MW au-delà de leur quatrième examen périodique. L’ASN "considère que l’ensemble des dispositions prévues par EDF et celles qu’elle prescrit ouvrent la perspective d’une poursuite de fonctionnement des réacteurs de 900 MW pour les dix ans suivant leur quatrième réexamen périodique".
Tricastin 1 est la première tranche du palier 900 MW à avoir réalisé sa VD4 avec succès : elle a été découplée le 1er juin 2019 et a divergé à l’issue de sa visite décennale le 19 décembre 2019.
La poursuite de la durée d’exploitation des tranches 900 MW sera mise en œuvre dans le respect de la programmation pluriannuelle de l’énergie qui couvre les périodes 2019-2023 et 2024-2028.
La durée d’amortissement des autres paliers du parc nucléaire France (1 300 MW et 1 450 MW), qui sont plus récents, est, à ce stade, maintenue à 40 ans, les conditions pour un allongement n’étant pas réunies. L’allongement ultérieur des réacteurs des paliers les plus récents du parc nucléaire français est au cœur de la stratégie industrielle du Groupe.