Document d’enregistrement universel 2020

2. Facteurs de risques et cadre de maîtrise

  • l’activité nucléaire du Groupe est soumise à des réglementations détaillées et exigeantes, avec, notamment en France, un régime de contrôle et de réexamen périodique des installations nucléaires de base, qui porte, au premier chef, sur la sûreté nucléaire, la protection de l’environnement et de la santé publique, et d’autre part sur des considérations de sécurité contre les actes de malveillance. Ces réglementations peuvent faire l’objet d’un renforcement significatif de la part des autorités nationales ou européennes. Par ailleurs, un renforcement des réglementations ou une éventuelle non-conformité aux réglementations en vigueur ou futures pourrait conduire à devoir arrêter temporairement ou définitivement une ou plusieurs installations nucléaires du Groupe ou se traduire par des astreintes financières, comme le précise l’article L. 596-4 du code de l’environnement. Les cas de non-conformités aux réglementations ou de non-respect des engagements pris sont également susceptibles d’être utilisés par des tiers à l’encontre d’EDF et portés devant les tribunaux. L’augmentation du nombre de demandes de l’Autorité de la Sûreté Nucléaire et le renforcement des contrôles peuvent accroître les coûts de remise en conformité et les risques pour EDF ;
  • si l’activité nucléaire peut contribuer efficacement à la sécurité d’approvisionnement énergétique et à la lutte contre l’effet de serre, elle doit aussi démontrer sa compétitivité et son acceptation sociale aux différentes échelles de temps sur lesquelles elle s’exerce. L’activité nucléaire nécessitant par nature des investissements significatifs et de long terme, la robustesse et l’efficacité sur la durée des programmes d’entretien et de mise à niveau du parc en exploitation, des nouveaux projets de réacteurs, et le respect des engagements de très long terme font nécessairement l’objet d’une vigilance particulière, avec des cycles industriels qui se situent à l’échelle du siècle voire au-delà ;
  • le cycle du combustible nucléaire s’inscrit dans cette perspective industrielle de long terme. EDF a une responsabilité spécifique dans l’élaboration d’une stratégie de long terme avec les différentes parties prenantes ;
  • l’activité nucléaire est une activité industrielle qui réunit un grand nombre de partenaires industriels, en France, en Europe et à travers le monde. En France, EDF s’est vu confier, par les pouvoirs publics, le rôle de chef de file dans la filière nucléaire, avec l’intégration de la filiale Framatome, ce qui implique des risques spécifiques associés à l’exercice de cette responsabilité et aux activités de Framatome.

EDF étant le premier exploitant nucléaire mondial, l’exploitation du retour d’expérience mondial et l’inter-comparaison avec les meilleures pratiques industrielles internationales(1) constituent un défi permanent pour permettre au groupe EDF d’être en situation de pouvoir durablement maîtriser les risques de ce positionnement mondial.

5A – Non-respect des objectifs (i) d’exploitation et/ou (ii) de poursuite de fonctionnement des parcs nucléaires (France et Royaume-Uni).

Le Groupe pourrait ne pas atteindre les objectifs d’exploitation de ses parcs nucléaires, en termes de sûreté et de disponibilité. Il pourrait aussi ne pas poursuivre l’exploitation de ses réacteurs au-delà de l’échéance prévue actuellement, voire ne plus être autorisé à les exploiter jusqu’à cette échéance en France comme au Royaume-Uni. Le Groupe pourrait par ailleurs ne pas réussir à maîtriser en coûts et délais ses opérations de mise à niveau du parc en exploitation (« Grand Carénage » en France). Cela représente un risque majeur pour le Groupe.

Criticité compte tenu des actions de maîtrise engagées : Forte.
Parc nucléaire en France

L’atteinte des objectifs d’exploitation et la réussite des projets de maintenance, y compris des projets du Grand Carénage, pourrait être affectée par la crise sanitaire. Celle-ci pourrait, si elle devait s’aggraver, induire de nouveaux retards ou surcoûts liés notamment aux contraintes sanitaires imposées (gestes barrières, couvre-feu, confinement…).

En France, le parc de réacteurs nucléaires actuellement exploités par le Groupe est très standardisé (voir section 1.4.1.1.2.1 « Le parc nucléaire d’EDF en France et son exploitation »). Ceci permet notamment au Groupe de réaliser des économies d’échelle, de répercuter sur l’ensemble de son parc les améliorations effectuées sur les réacteurs plus récents et d’anticiper, en cas de dysfonctionnement sur un réacteur, les mesures à prendre sur les autres. Mais cette standardisation a pour corollaire le risque d’un dysfonctionnement commun à plusieurs réacteurs ou à une génération ou encore à un palier de réacteurs (voir section 1.4.1.1.2 « Exploitation du parc nucléaire et performances techniques »).

Le Groupe ne peut pas garantir qu’il ne sera pas confronté à des réparations génériques ou des modifications lourdes et coûteuses, à effectuer sur l’ensemble ou sur une partie du parc. Par ailleurs, on ne peut exclure que surviennent des événements pouvant avoir un impact sur le fonctionnement du parc ou sur sa production qui pourraient entraîner un arrêt momentané ou la fermeture de tout ou partie du parc. Ainsi, l’écart lié au procédé de détensionnement des soudures de générateurs de vapeur (GV) détecté et signalé à l’Autorité de Sûreté à l’été 2019 a concerné les GV installés sur 6 réacteurs du parc nucléaire en exploitation en France et l’EPR de Flamanville 3. Cet événement n’a toutefois finalement pas conduit à une indisponibilité de réacteurs (voir risque 4A - Framatome).

À l’occasion des réexamens périodiques effectués lors des visites décennales et à la suite de l’accident de Fukushima au Japon, le Groupe a été conduit à élaborer un important programme de travaux, appelé « Grand Carénage », dont le principe a été approuvé en Conseil d’administration (Voir section 1.4.1.1.2). Les aléas potentiels de celui-ci incluent un éventuel retard dans l’instruction des autorisations requises pour l’engagement des opérations, notamment pour ce qui concerne les autorisations attendues de la part de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Ils peuvent également concerner la fabrication et la livraison sur site des nouveaux équipements ou la réalisation des interventions sur les sites dans un contexte de forte densité d’opérations industrielles à mener concomitamment. D’éventuels retards induits par la crise sanitaire pourraient également ne pas permettre de finaliser les travaux dans les délais prescrits.

Pour chaque réacteur, l’ASN se prononce sur les dispositions prises par l’exploitant et peut édicter des prescriptions complémentaires. Des solutions sont étudiées pour démontrer la capacité des équipements non remplaçables, à savoir les enceintes de confinement et les cuves des réacteurs, à assurer leur fonction jusqu’à 60 ans. Ces études, qui s’appuient sur les données disponibles en France mais également à l’international(2) permettent de confirmer les marges de sûreté disponibles pour les durées de fonctionnement en cours d’instruction mais peuvent également conduire à devoir adopter, le cas échéant, des mesures conservatoires complémentaires à prendre sur le parc existant, ce qui pourrait avoir des conséquences sur sa performance.

Afin de continuer à bénéficier de la production pilotable bas carbone et des flux de trésorerie provenant de son parc existant, le Groupe vise depuis plusieurs années à poursuivre la durée de fonctionnement de son parc nucléaire en France après 40 ans. La quatrième visite décennale des réacteurs du palier 900 MWe (VD4-900), à l’instar des précédentes comprend, d’une part une vérification de la conformité des installations au référentiel actuel et, d’autre part, une réévaluation de sûreté. Celle-ci permet de renforcer le niveau de sûreté en prenant en compte d’une part les meilleures pratiques internationales, et d’autre part, l’état des installations, l’expérience acquise au cours de l’exploitation et l’évolution des connaissances et des règles applicables aux installations similaires. L’ASN pourrait, dans le cadre de ce processus, prescrire des modifications supplémentaires significatives.

Dans sa décision du 23 février 2021 sur les conditions de la poursuite de fonctionnement des réacteurs de 900 MWe d’EDF au-delà de leur quatrième réexamen périodique, l’ASN considère que les dispositions prévues par EDF, complétées par les réponses aux prescriptions formulées par l’ASN, permettront d’atteindre les objectifs du réexamen et que ces améliorations de sûreté ouvrent la perspective d’une poursuite de fonctionnement des réacteurs de 900 MWe pour dix ans au- delà de leur quatrième réexamen périodique moyennant la mise en œuvre de dispositions complémentaires. Ces nouvelles demandes induisent une augmentation des investissements et une charge industrielle supplémentaire de l’ordre de 25% par rapport au programme initial déjà très ambitieux, augmentant le risque sur la capacité à faire des industriels dans les délais prescrits. Ce surcoût est pris en compte pour la période de 2014 à 2025 dans l’augmentation de coût du Grand Carénage telle qu’annoncée par le communiqué de presse du 29 octobre 2020. Les dépenses d’investissement resteront élevées au-delà de 2025.

(1) Exploitation des standards et du retour d’expérience de l’Agence internationale de l’Énergie Atomique et de l’Association mondiale des exploitants nucléaires WANO.

(2) Quatre réacteurs aux États-Unis ont obtenu une licence d’exploitation jusqu’à 80 ans. Pour six autres la demande de licence est en cours d’instruction : The Nuclear Regulatory Commission (NRC) staff has defined subsequent license renewal (SLR) to be the period of extended operation from 60 years to 80 years 
(www.nrc.gov/reactors/operating/licensing/renewal/subsequent-license-renewal.html).