6. États financiers

Les opérations en cours concernent les centrales qui ont été construites et exploitées avant le parc nucléaire actuel (centrales de « première génération ») ainsi que la centrale de Superphenix et l’Atelier des Matériaux Irradiés. Ces opérations couvrent quatre technologies différentes de réacteurs : réacteur à eau lourde (Brennilis), réacteur à neutrons rapides refroidi au sodium (Superphenix à Creys-Malville), réacteur modéré au graphite et refroidi au gaz (réacteurs UNGG à Chinon, Saint Laurent et Bugey) et réacteur à eau pressurisée (« REP » à Chooz). Ces opérations constituent des premières pour EDF et, à l’exception du REP, elles concernent des technologies de réacteurs pour lesquelles le retour d’expérience international est faible voire inexistant. Elles nécessitent donc le développement de méthodes et technologies nouvelles qui comportent un risque plus important que des technologies disposant déjà d’un retour d’expérience. La déconstruction du REP à Chooz bénéficie d’un retour d’expérience (essentiellement américain et limité) mais présente la particularité de se situer dans une caverne, ce qui en fait également une opération singulière pour laquelle le retour d’expérience n’est pas immédiatement transposable et qui comprend des aléas spécifiques.

Le retour d’expérience acquis sur le REP de Chooz permet toutefois de rendre robuste autant que possible les études et l’estimation des coûts futurs de la déconstruction du parc nucléaire actuellement en fonctionnement (centrales de « deuxième génération »). Néanmoins, EDF, ni aucun autre opérateur, n’a aujourd’hui engagé un programme de déconstruction à une échelle comparable à celle du parc REP actuel et les estimations comportent donc à la fois des opportunités et des risques notamment associés à cet effet d’échelle.

Les provisions pour déconstruction couvrent les charges futures de déconstruction telles que décrites ci-dessus (à l’exception de l’évacuation et du stockage des déchets qui relèvent de la provision pour gestion à long terme des déchets).

Le plan de démantèlement préliminaire ainsi que les orientations pour le 4e réexamen périodique (« RP4 ») de Fessenheim ont été transmis à l’ASN en juillet 2018. L’APC (Avant-Projet Consolidé) a été finalisé fin 2018, avec des études d’approfondissement et de dérisquage de l’APS (Avant-Projet Sommaire). Les études 2019 se sont portées sur la préparation du dossier de démantèlement, avec pour objectif le dépôt des dossiers de démantèlement et de RP4 mi-2020.

Le 30 septembre 2019, EDF a adressé au ministre chargé de la transition écologique et solidaire et à l’Autorité de sûreté nucléaire la demande d’abrogation d’exploiter ainsi que la déclaration de mise à l’arrêt définitif des deux réacteurs de la centrale nucléaire de Fessenheim, prévoyant un arrêt du réacteur n° 1 le 22 février 2020 et du réacteur n° 2 le 30 juin de la même année (voir note 2.1.4)

Les variations des provisions pour déconstruction des centrales nucléaires se répartissent comme suit :



DotationsReprisesAutres
(en millions d’euros)2018ExploitationFinancièresSuite à utilisation
2019
Provisions pour déconstruction des centrales nucléaires en exploitation

Provisions pour déconstruction des centrales nucléaires en exploitation


12 480

Provisions pour déconstruction des centrales nucléaires en exploitation

Dotations

2

Provisions pour déconstruction des centrales nucléaires en exploitation

Reprises

488

Provisions pour déconstruction des centrales nucléaires en exploitation

Autres

(20)

Provisions pour déconstruction des centrales nucléaires en exploitation


294

13 244
Provisions pour déconstruction des centrales nucléaires arrêtées

Provisions pour déconstruction des centrales nucléaires arrêtées


3 505

Provisions pour déconstruction des centrales nucléaires arrêtées

Dotations

103

Provisions pour déconstruction des centrales nucléaires arrêtées

Reprises

206

Provisions pour déconstruction des centrales nucléaires arrêtées

Autres

(121)

Provisions pour déconstruction des centrales nucléaires arrêtées


-

3 693
TOTAL PROVISIONS POUR DÉCONSTRUCTION DES CENTRALES NUCLÉAIRESTOTAL PROVISIONS POUR DÉCONSTRUCTION DES CENTRALES NUCLÉAIRES
15 985
TOTAL PROVISIONS POUR DÉCONSTRUCTION DES CENTRALES NUCLÉAIRESDotations105TOTAL PROVISIONS POUR DÉCONSTRUCTION DES CENTRALES NUCLÉAIRESReprises694TOTAL PROVISIONS POUR DÉCONSTRUCTION DES CENTRALES NUCLÉAIRESAutres(141)TOTAL PROVISIONS POUR DÉCONSTRUCTION DES CENTRALES NUCLÉAIRES
294
16 937

(1)Il s’agit des charges financières de désactualisation et des effets de variation du taux d’actualisation net pour les provisions non adossées à des actifs.
(2)Il s’agit de changements d’estimations dont la contrepartie est comptabilisée en variations des immobilisations corporelles (voir note 1.15.1) ou de reclassements de provisions.

Pour les centrales nucléaires en exploitation (filière réacteur à eau pressurisée (REP) paliers 900 MW, 1 300 MW et N4)

Jusqu’en 2013, les provisions ont été évaluées sur la base d’une étude du ministère de l’Industrie et du Commerce datant de 1991, qui a déterminé une estimation du coût de référence de déconstruction exprimé en euros par megawatt, confirmant les hypothèses de la Commission PEON de 1979. Ces évaluations avaient été confortées, à partir de 2009, par une étude détaillée des coûts de déconstruction réalisée par l’entreprise sur un site représentatif, soit le site de Dampierre (4 tranches 900 MW) et dont les résultats ont été corroborés par une inter-comparaison avec l’étude du cabinet La Guardia, fondée notamment sur le réacteur de Maine Yankee aux États-Unis.

En 2014, l’étude Dampierre a fait l’objet d’un réexamen par l’entreprise pour s’assurer qu’il n’y avait pas d’évolutions ou de retours d’expérience récents, tant au niveau international qu’en interne, remettant en cause les chiffrages précédents. Les provisions pour déconstruction des centrales en exploitation ont alors été évaluées sur la base des coûts issus de l’étude Dampierre afin de prendre en compte les meilleures estimations de l’entreprise et les retours d’expérience en France et à l’international. Ce changement d’estimation n’avait pas eu d’impact significatif sur le niveau des provisions au
31 décembre 2014.

Entre juin 2014 et juillet 2015, un audit sur les coûts du démantèlement du parc nucléaire d’EDF en exploitation, commandité par la Direction Générale de l’Énergie et du Climat (DGEC), a été conduit par des cabinets spécialisés. Le 15 janvier 2016, la DGEC a rendu publique la synthèse du rapport de cet audit. L’Administration a indiqué que, bien que l’estimation du coût du démantèlement de réacteurs nucléaires reste un exercice délicat, compte tenu du retour d’expérience relativement limité, des perspectives d’évolution des techniques et de l’éloignement des dépenses dans le temps, l’audit confortait globalement l’estimation faite par EDF du coût du démantèlement de son parc nucléaire en exploitation. L’Administration a également formulé à EDF un certain nombre de recommandations suite à cet audit.

En 2016, EDF a effectué une révision du devis de démantèlement afin de prendre en compte, d’une part, les recommandations de l’audit qui lui avaient été adressées, et d’autre part, le retour d’expérience des opérations de démantèlement des réacteurs de première génération (en particulier Chooz A).

Le travail de révision du devis a consisté en la mise en œuvre d’une démarche analytique détaillée, identifiant l’ensemble des coûts d’ingénierie, de travaux, d’exploitation et de traitement des déchets liés au démantèlement futur des réacteurs en cours de fonctionnement. Il permet d’aboutir à un chiffrage reposant sur des chroniques détaillées de démantèlement des centrales. La démarche adoptée a permis d’approfondir l’évaluation des coûts propres aux têtes de série, estimés pour chaque palier à partir de coefficients de transposition appliqués au coût de référence de la tête de série 900 MW, ainsi que les effets de série et de mutualisation, ces coûts et effets étant en effet inhérents à la taille et à la configuration du parc.

Les natures des principaux effets de mutualisation et de série retenus dans les chiffrages du devis sont explicitées ci-dessous.

Les effets de mutualisation sont de différentes natures :

  • certains sont liés au partage de bâtiments et d’équipements communs entre plusieurs réacteurs sur un même site, qu’il n’y a donc pas à démanteler deux fois. Ainsi, structurellement, le démantèlement d’une paire de réacteurs sur un même site coûte moins cher que le démantèlement de deux réacteurs isolés sur deux sites différents. En France, à la différence des autres pays, il n’y a pas de réacteurs isolés mais des sites avec 2, 4 et dans un cas, 6 réacteurs ;
  • certains coûts ne sont pas accrus si l’on démantèle 2 ou 4 réacteurs sur un même site. C’est le cas généralement des coûts de surveillance et de maintien du site en conditions opérationnelles sûres ;
  • le traitement des déchets dans des installations centralisées (par exemple pour la découpe des grands composants) est moins onéreux que la multiplication des installations de traitement sur les chantiers de démantèlement.