1. Le Groupe, sa stratégie et ses activités

Dans le cadre des études associées aux troisièmes visites décennales du palier 900 MW, l’ASN avait publiquement indiqué début juillet 2009 qu’elle n’avait pas identifié de problème générique mettant en cause la capacité d’EDF à maîtriser la sûreté de ses réacteurs de 900 MW jusqu’à 40 ans. Cette position générique de l’ASN est complétée par des décisions réacteur par réacteur.

La stratégie industrielle d’EDF est d’exploiter le parc après 40 ans, dans des conditions optimales de sûreté et de performance, compte tenu d’une part de l’investissement important, réalisé lors des troisièmes visites décennales ainsi qu’au titre des améliorations post-Fukushima, et compte tenu d’autre part des besoins énergétiques de la France. Cet objectif s’inscrit pleinement dans la tendance observée au plan international pour les centrales de technologie analogue. À cette fin, EDF a engagé des plans d’actions industriels et de R&D. Des actions sont engagées pour renouveler les gros composants qui peuvent l’être (voir section 1.4.1.1.2 « Exploitation du parc nucléaire et performances techniques ») et des solutions sont étudiées pour démontrer la capacité des équipements non remplaçables, à savoir les enceintes de confinement et les cuves des réacteurs, à assurer leur fonction jusqu’à 60 ans.

La poursuite de l’exploitation du parc nucléaire actuel permettrait, dans le respect de la priorité absolue que constitue la sûreté nucléaire et dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie (voir section 1.4.1.1.2 « Exploitation du parc nucléaire et performances techniques »), de faire le meilleur usage du patrimoine industriel qu’il constitue, et de lisser dans le temps les mises en services de centrales neuves.

L’allongement de la durée d’amortissement de 40 ans à 50 ans des centrales du palier REP 900 MW hors Fessenheim au 1er janvier 2016 a été enregistré en juin 2016 une fois que toutes les conditions techniques, économiques et de gouvernance nécessaires permettant de mettre en adéquation la durée d’amortissement du parc nucléaire France avec la stratégie industrielle du Groupe ont été réunies. Elle s’appuie sur la capacité technique des installations du parc REP 900 MW à fonctionner 50 ans au moins, confortée par les benchmarks internationaux, ainsi que sur les investissements progressivement engagés dans le cadre du programme « Grand carénage ». Ces investissements permettront au palier REP 900 MW d’atteindre un niveau de sûreté aussi proche que possible de celui de l’EPR et parmi les plus élevés au plan international à l’issue de leur quatrième visite décennale (VD4).

La poursuite de la durée d’exploitation des tranches 900 MW sera mise en cohérence avec la révision en cours de la programmation pluriannuelle de l’énergie pour les périodes 2018-2023 et 2024-2028.

S’agissant des améliorations de la sûreté à réaliser pour étendre la durée de fonctionnement des installations concernées au-delà de 40 ans, l’ASN a indiqué qu’elle émettrait à la suite du Groupe Permanent d’Experts d’avril 2015 une première position sur les grandes orientations du réexamen périodique associé aux quatrièmes visites décennales des réacteurs 900 MW. Elle prévoyait initialement de rendre en 2018-2019 une position définitive sur la phase « générique » de ce réexamen. Le 20 avril 2016, l’ASN a adressé une lettre à EDF dans laquelle elle définit ses attentes pour permettre une éventuelle poursuite de la durée de fonctionnement des réacteurs nucléaires français de 900 MW. Après examen du dossier dans lequel EDF présentes a démarche et sa méthodologie pour prolonger l’utilisation des 34 réacteurs concernés après 40 ans, l’ASN considère que les thèmes retenus par EDF dans son programme correspondent aux enjeux de sûreté et n’appellent pas de remarques des a part dans leur principe. Elle demande toutefois à EDF de compléter son programme sur plusieurs aspects, notamment sur le périmètre des programmes de contrôle et les objectifs d’amélioration des études.

Dans son courrier du 28 septembre 2018 relatif à la note de réponse aux objectifs (NRO) du 4e réexamen périodique des tranches 900 MW, l’ASN considère que « les travaux entrepris et les dispositions prévues conduiront à des améliorations significatives de la sûreté des installations et contribueront à l’atteinte des objectifs du réexamen ». L’ASN prévoit de donner un avis générique en 2020. D’ici là, l’instruction se poursuit et EDF prend en compte les demandes complémentaires de l’ASN en termes d’études, de contrôles et de travaux.

En septembre 2018, EDF a également lancé, aux côtés de l’IRSN et de l’Association nationale des comités et commissions locales d’information (ANCCLI), une concertation sur la phase générique du 4e réexamen périodique des réacteurs de 900 MW, d’une durée de 6 mois, afin d’associer le grand public au débat et de lui permettre d’échanger avec des experts d’EDF, de l’ASN et de l’IRSN au cours de réunions publiques, organisées notamment par les Commissions Locales d’Information (CLI) des sites concernés. Une plate-forme numérique vient compléter les réunions publiques.

La durée d’amortissement des autres paliers du parc nucléaire France (1300 MW et 1450 MW), qui sont plus récents, est, à ce stade, maintenue à 40 ans, les conditions pour un allongement n’étant pas réunies. L’allongement ultérieur des réacteurs des paliers les plus récents du parc nucléaire français est au cœur de la stratégie industrielle du Groupe.

À fin 2019, 32 des 34 tranches de 900 MW ont passé leur troisième visite décennale. La VD3 de Chinon B3 débutée en 2019 sera soldée en 2020. La dernière VD3 du palier 900 MW (Chinon B4) est programmée en 2020.

La VD4 de Tricastin 1, première tranche du palier 900 MW à réaliser sa VD4, a été un succès : elle a été découplée le 1er juin 2019, et a divergé à l’issue de sa visite décennale le 19 décembre 2019.

Sur le palier 1300 MW, 11 VD3 ont été réalisées, une VD3 était en cours de réalisation à fin décembre 2019 (Flamanville 2), et 8 VD3 restaient à réaliser à fin décembre 2019, dont deux en 2020 (Belleville 1 et Nogent 2).

1.4.1.1.6 La déconstruction des centrales nucléaires

EDF assume la responsabilité réglementaire, financière et technique de la déconstruction de ses centrales et des autres installations nucléaires dont il est exploitant (BCOT, Silos de St Laurent, ICEDA…). EDF s’est organisé pour assurer, au travers du processus de déconstruction, sa maîtrise de l’ensemble du cycle de vie des moyens de production nucléaire.

Le scénario de référence adopté par EDF depuis 2001 est une déconstruction sans période intentionnelle d’attente pour décroissance radioactive, en cohérence avec la réglementation française qui prévoit un démantèlement « dans un délai aussi court que possible dans les conditions économiquement acceptables et dans le respect des principes énoncés à l’article L. 1333-2 du Code de la santé publique et au II de l’article L. 110-1 du présent Code » (voir article L. 593-25 du Code de l’environnement).

Le processus réglementaire du démantèlement est encadré par le Code de l’environnement (voir section 1.5.3.2 « Réglementation applicable aux installations nucléaires de base »). Pour un site donné, il se caractérise par :

  • une déclaration d’arrêt définitif au moins deux ans avant la date d’arrêt envisagée ;
  • une demande de démantèlement conduisant, après instruction par les autorités et enquête publique, à un décret d’autorisation, permettant la déconstruction ;
  • des points d’étape clés avec l’ASN, intégrés dans un référentiel de sûreté propre aux opérations de démantèlement ;
  • enfin, une fois les opérations terminées et l’état final visé atteint, le « déclassement » de l’installation la faisant sortir du régime juridique des installations nucléaires de base.
La déconstruction des centrales à l’arrêt définitif

Concernant les centrales à l’arrêt définitif (un réacteur à eau pressurisée [REP], Chooz A ; un réacteur à eau lourde [REL], Brennilis ; un réacteur à neutrons rapides [RNR], Creys-Malville ; et six réacteurs de la filière Uranium Naturel – Graphite Gaz [UNGG] à Bugey, Saint-Laurent et Chinon), le choix effectué par EDF est de les déconstruire intégralement dans un délai aussi court que possible dans des conditions économiquement acceptables, en respectant les principes des Codes de la santé publique et de l’environnement et en s’assurant de la maîtrise des risques techniques associés à ces activités.

Ces sites demeurant la propriété d’EDF, ils restent placés sous sa responsabilité et sa surveillance.

Dans le cadre de son rôle d’exploitant responsable, EDF assure la maîtrise d’ouvrage de la déconstruction.

La déconstruction des neuf centrales nucléaires d’EDF mises à l’arrêt définitif (programme « première génération ») produira environ un million de tonnes de déchets primaires, dont 80 % de déchets non radioactifs, et aucun déchet de Haute Activité. Les 20 % restants correspondent à des déchets de Très Faible à Moyenne Activité, dont environ 2 % de déchets à vie longue nécessitant la mise à disposition d’un centre de stockage pour déchets de type FAVL et MAVL.

Les filières existantes pour l’évacuation des déchets à vie courte TFA et FMA seront complétées par :

  • l’Installation de Conditionnement et d’Entreposage des Déchets Activés (ICEDA) pour le conditionnement et l’entreposage des déchets activés d’exploitation et de déconstruction (MAVL) située sur le site de Bugey et ce dès 2020 ;
  • le centre de stockage des déchets FAVL qui est inscrit dans la loi du 28 juin 2006 relative à la gestion durable des matières et des déchets radioactifs. Une première recherche de sites lancée par l’ANDRA en 2008 n’ayant pas abouti, après remise d’un rapport à l’État fin 2012, l’ANDRA a repris la recherche en 2013 et a transmis en juillet 2015 un dossier concernant la faisabilité d’un centre de stockage sur un site situé dans la région de Soulaines (voir section 1.4.1.1.4 « Cycle du combustible nucléaire et enjeux associés »). Par ailleurs, le nouveau calendrier de déconstruction des centrales UNGG prévoit la construction d’un entreposage pour les chemises FAVL des silos de Saint-Laurent dans l’attente de la disponibilité d’un exutoire définitif (première sortie du graphite à l’horizon 2044).