En 2019, les performances de production ont été affectées par des avaries exceptionnelles et des aléas dimensionnants (pour environ 12 TWh), par des prolongations d’arrêt plus importantes que prévues (pour environ 12 TWh) et par des contraintes environnementales (pour environ 4 TWh dont le séisme du Teil pour 2,3 TWh). Les prolongations d’arrêt observées en 2019 trouvent leurs origines dans des proportions équivalentes, dans des non-qualités de maintenance et d’exploitation, dans des avaries techniques et dans des défauts de maîtrise des projets. Les pertes de performance liées aux in disponibilités fortuites (taux de 3,95 % en 2019 contre 3,7 % en 2018) ont légèrement augmenté en 2019 du fait de plusieurs avaries exceptionnelles. Sans celles-ci, le taux d’indisponibilité fortuite aurait été de 2,1 %. Ces résultats ne remettent pas en cause la stratégie de maintenance volontariste mise en œuvre depuis 2007 au niveau de la rénovation et du remplacement des gros composants, qui globalement a permis de baisser de 30 % le taux d’indisponibilité fortuite depuis 2009.
Les principaux aléas techniques qui ont impacté la production en 2019 sont :
La production 2019 n’a pas été impactée par l’instruction des écarts qualité détectés dans certains dossiers de suivi de fabrication de pièces forgées (problématique dite des dossiers « barrés » et « non barrés ») dans l’usine Creusot Forges de Framatome.
Framatome a mis en évidence à l’été 2019 le non-respect de plages de températures lors de l’application de certains traitements thermiques de détensionnement (TTD) locaux réalisés sur des joints de générateurs de vapeur et de pressuriseurs (cf. section 1.4.1.3.2 Activités de Framatome). A la suite de cet écart déclaré à l’ASN, EDF a déterminé la liste des matériels concernés: 16 générateurs de vapeur (GV) installés sur 6 réacteurs nucléaires en exploitation (Blayais, Bugey, Fessenheim, Dampierre, Paluel). Sont aussi concernés les GV et le pressuriseur de l’EPR de Flamanville 3 ainsi que 6 GV destinés
à remplacer ceux de deux réacteurs de Gravelines. EDF et Framatome ont transmis à
l’ASN des justifications montrant que l’intégrité des équipements n’était pas remise
en cause. Sur la base de ces éléments et après analyse, l’ASN a estimé que
« les réacteurs concernés peuvent continuer à fonctionner en l’état ».
L’instruction technique de ce dossier se poursuit en lien avec l’ASN.
Par ailleurs, EDF a poursuivi sa démarche de structuration pour garantir la maîtrise de la conformité matérielle de ses installations nucléaires. EDF a ainsi présenté à l’ASN un plan d’actions permettant de prioriser et d’organiser le traitement des écarts de conformité en tenant compte des enjeux de sûreté. Sa mise en œuvre mobilise l’ensemble des CNPE et des unités d’ingénieries nationales.
La stratégie industrielle d’EDF est d’exploiter le parc nucléaire existant significativement au-delà de 40 ans, dans les meilleures conditions de sûreté nucléaire (en intégrant notamment les modifications post-Fukushima), de sécurité et de protection de l’environnement, ce qui nécessite de poursuivre la réalisation de volumes de travaux de maintenance importants sur la période 2014-2025. Le programme « Grand carénage » a été mis en place afin que le Groupe soit en capacité d’intégrer, avec ses partenaires industriels, l’important volume de travaux sur le parc.
Le 22 janvier 2015, le Conseil d’administration d’EDF a approuvé le principe du programme du « Grand carénage », destiné à rénover le parc nucléaire français, à augmenter le niveau de sûreté des réacteurs et, si les conditions sont réunies, à poursuivre leur fonctionnement. Le montant total d’investissements autorisé s’établit au maximum à 55 milliards d’euros2013 (soit 60 milliards d’euros courants) sur la période 2014-2025 pour les 58 réacteurs du parc en fonctionnement (1).
Le montant du programme recouvre à la fois, sur le parc nucléaire existant, les investissements de maintenance courante et ceux nécessaires à l’extension de la durée de vie (remplacement des générateurs de vapeur, VD4 900, VD3 1300).
Les travaux d’optimisation conduits depuis (réduction et reports) ont permis de réviser à la baisse l’enveloppe initiale du programme à environ 45 milliards euros2013 (soit 48 milliards d’euros courants) sur la période 2014-2025. Cette révision a été obtenue pour l’essentiel grâce aux efforts permanents d’optimisation des solutions techniques retenues et des stratégies de remplacements de composants, et à la plus grande finesse de leur déploiement intégrant les capacités du tissu industriel, ce qui a permis le report de certaines dépenses. Il a également été tenu compte d’une date de fermeture anticipée de la centrale de Fessenheim (en 2020 dans la dernière prévision).
Dans cette logique industrielle, la réduction des coûts est d’environ 6 milliards d’euros2013 (soit 7,5 milliards d’euros courants) et le report au-delà de 2025 d’environ 3,8 milliards d’euros2013 (soit 4,7 milliards d’euros courants) soit un total de près de 10 milliards d’euros2013 (ou 12 milliards d’euros courants) par rapport à l’estimation initiale.
La contribution des reports à cette révision globale a ainsi été légèrement révisée à la hausse en 2018 par rapport à 2017. En effet, si des gains supplémentaires ont été identifiés concernant les visites décennales et le déploiement du retour d’expérience de Fukushima (pour un total de 6,2 milliards d’euros2013 ou 7,2 milliards d’euros courants), les remplacements de générateurs de vapeur et de gros composants (pour un total de 4 milliards d’euros2013 ou 4,6 milliards d’euros courants) et les autres projets d’ingénierie (pour un total de 1,8 milliard d’euros2013 ou 2,1 milliards d’euros courants), ils ont été compensés par une augmentation de l’ordre de 2 milliards d’euros courants, à compter de 2019, des investissements de maintenance courante, essentiellement du fait d’une meilleure identification des dépenses de contrôles périodiques devant faire l’objet d’une comptabilisation en investissements.
Pour mener à bien le programme, une entité distincte « Grand carénage » a été crée. Le commanditaire du programme est le Directeur de la Direction du Parc Nucléaire et Thermique (DPNT), qui valide le périmètre du programme actuellement décomposé en 20 projets, ainsi que les conséquences financières. La maîtrise d’ouvrage du programme est assurée par la Division Production Nucléaire qui définit le contenu des activités. La maîtrise d’œuvre est assurée par le Directeur du programme assisté des responsables de projets, sur toute la vie du projet sur tous les champs : délais de réalisation, qualité, conséquence financière. Le Conseil d’administration examine les principaux investissements par grande catégorie de projets dont les principales caractéristiques lui sont présentées ; il approuve les contrats ou marchés qui dépassent un montant prédéfini ; enfin, il procède à l’examen annuel de l’exécution du programme, à partir d’indicateurs donnant la mesure de son état d’avancement physique et financier, le reste à faire et les coûts à terminaison.
Ce programme industriel est déployé progressivement, dans le respect des objectifs de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, des programmations pluriannuelles de l’énergie, des avis et prescriptions de l’ASN ainsi que des procédures d’autorisation prévues pour un fonctionnement des réacteurs au-delà de 40 ans (voir section 1.4.1.1.5 « Préparation de l’avenir du parc nucléaire en France »).
Au sein de ce programme, les projets de rénovation ou de remplacement des gros composants des centrales comme les alternateurs, les transformateurs ou les générateurs de vapeur se poursuivront.
À fin 2019 :
(1) Les chiffres présentés par la Cour des comptes dans son rapport du 10 février 2016 portent sur un horizon de temps plus long, allant jusqu’à 2030, et incluaient, au-delà des investissements, les dépenses d’exploitation de maintenance. Les deux évaluations sont cohérentes, comme le précise la Cour des comptes dans son rapport. En effet, dans le chiffrage global, tel que présenté
par la Cour des comptes, proche de 100 milliards d’euros pour la période 2014-2030, il convient de distinguer les dépenses d’investissement estimées à 74,73 milliards d’euros, et celles d’exploitation estimées à 25,16 milliards d’euros2013. Au sein des 74,73 milliards d’euros 2013 de dépenses d’investissement entre 2014 et 2030, 55 milliards d’euros2013 sont dédiés à la période 2014-2025, ce qui permet de relier les deux chiffrages établis par le groupe EDF et la Cour des comptes.